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Appel à communication
Colloque international "Le goà »t des autres. De l’expérience de l’altérité gastronomique à l’appropriation (Europe, XVIIIe-XXIe siècles)", Bakou (Azerbaïdjan), mi-octobre 2010.
Colloque organisé par l’Université slave de Bakou (BSU), l’Université Nancy II (CERCLE), l’Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines (CHCSC) (Programme de recherche « Nouvelles approches des frontières culturelles », NAFTES, MSH Lorraine, Axe 1)
L’altérité a fait l’objet d’ouvrages importants, notamment dans le champ sociologique. Le questionnement sur la découverte et la perception des aliments et des cuisines de l’Autre, a permis de confronter leurs schémas théoriques à des études de cas. Ce questionnement, souvent mais pas uniquement forgé dans le sillage de l’histoire des colonies ou des postcolonial studies et plus généralement marqué par les préoccupations de l’anthropologie et de l’ethnologie, a par conséquent surtout porté sur l’Autre colonisé. Mais ne se pose-t-il pas également, comme l’ont avancé Sophie Bessis ou Faustine Régnier, pour qui « est “exotique”, tout ce qui n’est pas soi », à l’intérieur d’espaces géopolitiques comme l’Europe pour l’Autre proche ou relativement proche, pour celui qui est de l’autre côté de la frontière ?
A l’heure de la mondialisation cette interrogation n’appartiendrait-elle qu’au passé ? Certainement pas puisque la marche vers une uniformisation du goût, hypothétique mais fort redoutée, provoque depuis plusieurs décennies la (re)naissance de discours identitaires nationaux, régionaux voire même plus locaux encore. L’on sait que de multiples « brassages et métissages » alimentaires et culinaires se sont réalisés depuis l’Antiquité. Pourtant la représentation de la grande diversité des cuisines européennes, que donnent beaucoup de livres publiés récemment, nous ramène plutôt à la constatation de Diderot : « les goûts varient chez les différentes nations comme les moeurs et les opinions ». D’autre part, l’inclusion dans l’espace à étudier pour ce colloque, qui se tiendra à Bakou, de toute l’Europe orientale (pays nouvellement membres de l’Union Européenne et ceux qui restent à ses frontières), de la Russie, de la Turquie et des jeunes Etats du Caucase, a également pour fonction de montrer que ce questionnement historique, du Siècle des Lumières jusqu’à la mondialisation actuelle et à la redéfinition encore en cours de l’espace géopolitique, économique et culturel de l’Europe, peut également servir à éclairer le présent.
En effet notre colloque s’intègre dans un programme de recherches plus vaste sur les « frontières culturelles », lancé dans le cadre de la Maison des Sciences de l’Homme (MSH) Lorraine (axe 1). Les différences culturelles, vite transformées à certaines époques en oppositions, et par conséquent la différenciation par rapport à l’Autre, sont bien connues en Europe pour ce qui est des langues ou des religions. Cependant deux thèmes, à la fois prometteurs à la lumière de leur récente bibliographie et sans doute aussi fort complémentaires, ont été choisis afin de renouveler, en quelque sorte « décentrer », l’approche de cette notion : la danse et la gastronomie.
Ces recherches, surtout celles qui auront pour contexte historique la formation des nations européennes, peuvent éclairer davantage la construction du goût ou du dégoût des autres, l’édification d’une frontière culturelle entre une communauté – nationale, régionale ou locale – et sa voisine. Par ailleurs nous supposons que l’opposition radicale des attitudes différentialiste et universaliste, pour reprendre la terminologie de Tzvetan Todorov, ne recouvre pas la totalité des réactions par rapport à l’alimentation de l’Autre. Il est nécessaire de surcroît de les considérer de manière dynamique, en ne posant pas en postulat qu’elles seraient uniformes et définies à jamais. Afin de mieux saisir la complexité des modalités de la construction de l’altérité gastronomique, nous faisons appel à toutes les disciplines en sciences humaines et sociales et invitons particulièrement les études à se porter sur trois axes, combinables éventuellement dans une même communication :
l’instant de la découverte de plats, d’aliments, d’alcools et de manières de tables appartenant à des traditions culinaires et alimentaires autres.
la représentation du goût des autres (et par conséquent du sien propre) : construction et permanence de stéréotypes ; ou au contraire nuances apportées à ces stéréotypes, voire leur négation.
l’évolution de la perception du goût des autres qui conduit à franchir la frontière culturelle ; évolution qui peut aller jusqu’à son appropriation ou imitation.
Les sources utilisables sont multiples :
fictions littéraires, récits de voyage, guides et littérature gastronomiques, presse, cinéma, images, etc.
auxquels il faut ajouter, pour le passé proche, des sources médiatiques comme les émissions culinaires télévisées, les pages internet, les documentaires radiophoniques ou télévisés, etc.
En ce qui concerne la dernière catégorie citée, précisons qu’il existe des reportages dont le sujet se confond quasiment avec nos préoccupations. Il serait donc fort intéressant de les analyser dans notre colloque. Nous pensons en particulier à Nationalism on the menu , de Djordje Naskovic et David Muntaner, réalisé dans l’ex-Yougoslavie en 2007.
Mais de même qu’il n’y a pas seulement des « Food films » dans les fictions cinématographiques qui déroulent un discours gastronomique, il faut également avoir à l’esprit que nombre de réalisations évoquent « en passant » l’alimentation et la cuisine et que ces extraits peuvent constituer un corpus de premier ordre.
Comité d’organisation :
Rahilya Geybullayeva, Directrice du département d’études du journalisme et de la littérature azérie, Université slave de Bakou
Didier Francfort, Professeur d’histoire contemporaine, directeur du CERCLE, Université Nancy II
Denis Saillard, Centre d’histoire culturelle des sociétés contemporaines, Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines
Envoi des propositions :
Les propositions de communications (résumé, C.V., coordonnées) doivent nous parvenir avant le 1er mars 2010 aux adresses suivantes :
Arrivefrancfort@aol.com ; dsaillard@katamail.com
http://www.chcsc.uvsq.fr/colloques/appelLegoutdesautres.pdf
En savoir plus : http://www.chcsc.uvsq.fr/colloques/appelLegoutdesautres.pdf