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Appel à communication
Colloque international "L’auteur en réseau, les réseaux de l’auteur. Du livre à Internet", Pôle des métiers du livre (Saint-Cloud), 2-3 juillet 2010.
Le groupe de travail « Livre : Création, Culture et Société » du Centre d’Histoire Culturelle des Sociétés Contemporaines (Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines) anime depuis l’an dernier une série de journées d’étude et colloques autour de la question de l’Auteur. Dans le prolongement d’une première journée d’étude consacrée en juin 2009 à l’auteur dans une perspective historique[1], cet appel à communication entend continuer à explorer les plis et replis de l’auctorialité littéraire, cette fois-ci dans le contexte numérique.
Une dizaine d’années après l’appropriation d’Internet par le grand public, une réflexion sur les formes de visibilité et d’autorité que ce média autorise aujourd’hui pour les auteurs paraît pertinente. Car au-delà des discours qui célébraient naguère un nouvel eldorado éditorial, de l’apparition de formes nouvelles de circulation de l’écrit et la possibilité pour tous de "devenir" auteur, il convient de faire le point sur des trajectoires réelles d’auteurs dans l’univers numérique.
Certes, les recherches sur l’auteur à l’ère d’Internet sont déjà nombreuses et s’intéressent à tous les champs de la production et de la création, analysant aussi bien les formes numériques de la fonction-auteur, les dispositifs de publication ainsi que les mutations qui les accompagnent dans le champ éditorial, l’extension de la sphère d’auctorialité, l’évolution de la juridiction, etc. Mais dans ce contexte scientifique riche et foisonnant, c’est à la figure de l’auteur comme écrivain que nous consacrerons cette journée. Non pas pour rabattre la notion d’auteur sur celle d’écrivain, mais pour explorer les formes, processus, stratégies et dispositifs qui concourent à sa présence et à sa représentation dans l’univers numérique. On se demandera s’ils favorisent sa légitimation, voire sa consécration. Considéré dans la perspective foucaldienne comme dispositif, l’auteur se définit dans le champ culturel par la nature des liens qu’il entretient avec les professionnels de l’édition, par les réseaux forgés avec les acteurs du livre et de la lecture. Sur le "réseau des réseaux", les réseaux de l’auteur se reconfigurent-ils ?
L’évolution des supports et dispositifs de publication permet de rendre publics des écrits et des productions littéraires (poésie, fiction, bande-dessinée, journaux intimes…) en dehors des instances éditoriales liées à l’imprimé. De même les formes de circulation et de transmission numériques des textes contribuent à faire émerger des auteurs[3] qui intéressent parfois l’édition. Comme média de communication et de publication, Internet peut-il fonctionner, seul ou adossé à d’autres réseaux, dispositifs ou modes de légitimation comme un vecteur de consécration de l’auteur ? Et qu’autorise Internet que refuse le système de l’imprimé, fondé notamment fondé sur la singularisation de quelques auteurs et l’exclusion de la majorité ? Peut-on surtout y faire autorité et comment ? Dans quelle mesure le numérique participe-t-il – ou pas - au renouvellement des figures de l’écrivain, auprès du grand public, mais peut-être aussi au sein des professionnels du livre ?
Disciplines et méthodes
La volonté de croiser les approches et les terrains scientifiques est portée par l’idée que l’analyse du média Internet et des pratiques culturelles et professionnelles qu’il favorise, s’enrichit de la diversité des méthodes. En conséquence, les travaux en sciences de l’information et de la communication, en littérature, en sociologie, mais plus largement en sciences humaines et sociales seront les bienvenus.
On pourra porter une attention particulière aux dispositifs de promotion et de publication de l’écrivain, aux sites Internet, outils de sociabilisation et de présentation de l’auteur, formes de publication, communautés d’auteurs, de lecteurs, etc.
Axes d’étude
Deux axes principaux d’analyse sont ici proposés, constituant des angles précis d’approche, mais n’excluant pas d’autres propositions.
1. Médiations et stratégies numériques de l’auteur
Les formes et les stratégies de visibilité déployées en ligne, envisagées tant du point de vue de l’auteur que, le cas échéant, de son éditeur, seront ici envisagées. Comment les auteurs investissent-ils – ou pas - le web ? Comment la fonction-auteur émerge-t-elle ou se conforte-t-elle dans l’univers numérique ?
Formes et stratégies de publication : Comment l’auteur, écrivain consacré ou anonyme se construit-il sur Internet ? Que représente la publication électronique pour un auteur et quelles formes éditoriales prend-elle : autopublication, publication en revue, prépublication, reproduction partielle de l’imprimé, test de réception, validation plutôt que sélection, etc. ? Au regard du champ littéraire et de ses formes institutionnelles de consécration, l’auteur qui s’autopublie sur Internet est-il encore "indigne" ? Quelles formes de reconnaissance, de notoriété, de légitimation sont accordées aujourd’hui à ces dispositifs éditoriaux ? On pourra également ici interroger les représentations (sinon les mythologies) liées à l’auteur, à l’écrivain, mais aussi aux formes éditoriales qui ont émergé ou qui continuent de nourrir l’imaginaire du web à l’endroit de la production littéraire.
Stratégies éditoriales : Si les éditeurs de l’imprimé éprouvent parfois quelques difficultés à penser le numérique, on pourra développer ici des réflexions sur le soutien qu’ils apportent le cas échéant à leurs auteurs, notamment à travers les sites d’éditeurs, les vidéos, les mini-sites consacrés à un ouvrage ou à un auteur, les communautés de lecteurs, etc. Les politiques numériques de promotion d’ouvrages et de médiation éditoriale incorporent-elles l’innovation technologique et les services numériques ? Quels sont les types de liens ainsi établis entre l’éditeur et l’auteur sur le web ?
Modalités et figures de l’auteur sur Internet : Nombre de travaux ont déjà exploré les formes nouvelles et diversifiées de l’auctorialité sur Internet (individuelle ou collective), du devenir auteur[4]. Au regard du champ littéraire entendu au sens large, quelles sont dès lors les modalités du devenir écrivain dans l’univers numérique ? Les logiques de circulation, de popularité et d’audience identifiées sur Internet sont-elles à même de concurrencer ou de bousculer les processus traditionnels de légitimation de l’auteur ? Le réseau promeut-il des outils ou des formes nouvelles de consécration de l’auteur en ligne ? Bien qu’elle soit épineuse, la question de la valeur attachée à ces figures d’auteurs et à leur production en ligne pourra être posée.
2. Les dispositifs
On s’interrogera ici sur le rôle des dispositifs socio-techniques dans la construction numérique de l’auteur en portant l’analyse sur :
Les formes matérielles de la publication : Outre les blogs, les sites institutionnels, les forums, les listes de diffusion, les revues en ligne, on pourra analyser tous les outils qui permettent à un auteur de donner à lire sa production, de la partager, de la soumettre à l’appréciation et éventuellement à la critique de lecteurs. On se demandera notamment dans quelle(s) mesure(s) ces outils peuvent créer ou non un rapport différent à l’auteur.
Le rôle des outils d’information et de référencement dans l’émergence d’auteurs : Quelle est la part de la technique ou de procédés statistiques dans la remontée et la visibilité accordée à un auteur ? Comment ces dispositifs organisent-ils – ou pas – la circulation de la figure de l’auteur ? Les outils automatiques de référencement, de recherche d’information de recommandation (les librairies en ligne), de citation contribuent-ils à faire l’auteur ? Ces dispositifs sont-ils à même de "fabriquer de l’audience" ?
Les instances et processus de légitimation : Sites de libraires, de critiques, de bibliothécaires, blogs et communautés de lecteurs, forums de discussion, cercles d’échanges littéraires composent le panorama de la réception littéraire dessinant une articulation renouvelée entre parole d’experts et lecteurs passionnés et amateurs ? Comment ces dispositifs socio-techniques en ligne se positionnent-ils par rapport aux autres formes de consécration de l’auteur ( éditeurs, prix, concours, revues, etc.) ? En quoi produisent-ils ou non de l’inédit en matière de légitimation littéraire ? Le Net facilite-t-il ou non le droit d’entrée en littérature ? On pourra également s’interroger sur les figures d’auteurs qui émergent des sites dédiés au livre et des effets liés à leur circulation sur le net : fiches de libraires en ligne, critiques de lecteurs, critiques experts, etc.
Responsables :
Sylvie Ducas, CHCSC, université Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines
Oriane Deseilligny, GRIPIC- Celsa, université Paris Sorbonne
Forme et date limite de remise des propositions :
Les propositions devront prendre la forme d’un résumé d’environ 500 mots, accompagné d’une courte présentation de leur auteur (appartenance disciplinaire et laboratoire de rattachement, coordonnées téléphoniques et électroniques). Les propositions présenteront la problématique de recherche, la méthodologie employée, les axes de réflexion et les principales sources bibliographiques. Elles seront transmises par voie électronique avant le 21 décembre 2009 aux deux adresses suivantes :
oriane.deseilligny@iutv.univ-paris13.fr
sylvie.ducas@u-paris10.fr