SPHM Infos
Appel à contributions revue CinémAction "Le cinéma de science-fiction après le 11 septembre"
Date limite : 30 novembre 2015
Les attentats du 11 septembre constituent l’événement apocalyptique par excellence, ne serait-ce que par les bouleversements qu’ils ont engendrés dans le monde entier, et ce à un nombre considérable de niveaux différents. Au niveau de la politique internationale d’abord, parce qu’ils remettaient en cause la place des États-Unis dans le monde, et ont engendré une succession de campagnes militaires. Au niveau de la politique intérieure également, puisqu’ils ont donné lieu dans un grand nombre de pays à une intensification des mesures sécuritaires, notamment préventives. Au niveau esthétique enfin, puisque les images de l’événement possédaient des caractéristiques hautement cinématographiques. En réalisant leurs attentats contre les tours jumelles, les terroristes ont réussi à rendre réel un scénario-catastrophe jusque-là cantonné au cinéma sensationnel ou de science-fiction.
Il n’est donc guère étonnant que les images du 11 septembre continuent à hanter l’imaginaire du monde entier. De plus, ces attentats ont été suivis par une série d’attaques à l’anthrax qui a confronté le grand public au spectre de la guerre biologique. La réaction aux désastres n’a en effet pas uniquement concerné la sphère politique, mais également les produits culturels, dont on peut considérer qu’ils sont adaptés pour traiter les différents aspects du bouleversement causé par ces événements apocalyptiques. Cela vaut en particulier pour le cinéma de science-fiction de l’après 2001. Ce sont les films de cette période que nous proposons d’étudier ici, à travers le cinéma américain évidemment, mais également à travers l’étude des productions du plus grand nombre de pays possible.
Il est accepté depuis longtemps que la science-fiction est un genre qui reflète, suscite ou apaise les angoisses et les tensions d’une époque. Susan Sontag a par exemple évoqué « l’imaginaire du désastre », et a entrepris d’explorer le cinéma américain de science-fiction des années 50 pour montrer comment celui-ci exprimait les inquiétudes d’une population sur la possible utilisation d’armes atomiques. Dans un contexte similaire toutes proportions gardées, on peut donc envisager une telle réaction de la part du cinéma de science-fiction, genre propre à penser un événement éminemment traumatique. Notre but dans ce volume sera d’étudier les différentes réactions à l’événement telles qu’elles sont retranscrites dans le cinéma SF de l’après 11 septembre, non seulement en examinant les stratégies employées dans la production cinématographique de différents pays, mais également en envisageant divers types de réactions esthétiques à un événement qui provoque une profonde remise en question de repères jugés stables, à commencer par la distinction ontologique entre la réalité et la fiction – déjà malmenée, il est vrai, depuis le début de l’ère postmoderne.
Il sera possible, en particulier, d’envisager la science-fiction comme un mode qui définit plusieurs types de relations au réel, et de traiter différents sous-genres du cinéma de science-fiction post 11 septembre se différenciant par la manière dont ils tentent d’appréhender le nouveau rapport au réel né de l’événement traumatique. Les articles sélectionnés pourront donc suivre l’une des pistes suivantes (liste non-exhaustive) :
Si, comme le rappelle Asimov, la science-fiction exprime une réaction face à des bouleversements scientifiques et technologiques, on pourra se demander comment le cinéma de science-fiction tient compte de la poussée technologique postérieure aux attentats, caractérisée par l’intensification de la surveillance et de la collecte des données.
On pourra également se demander quel type de science-fiction dystopique les événements permettent d’envisager, notamment en fonction du lien classique entre la science-fiction et l’examen d’une potentialité, voire d’une probabilité scientifique.
Un autre axe pourra envisager le cinéma de science-fiction comme spéculatif. On pourra se demander comment les films de science-fiction permettent d’étudier un présent caractérisé par la perte des repères précédemment évoquée. Le nouveau rapport esthétique à la fiction et au réel implique-t-il de refonder la distanciation cognitive propre à la science-fiction ? Le dispositif cinématographique se voit-il bouleversé par le nouveau rapport au réel qu’induit l’événement ? Faut-il voir dans l’utilisation croissante d’images de synthèse un signe de ce nouveau rapport à la réalité, ou plus simplement le résultat d’un impératif commercial ?
Comment les films font-ils référence aux événements, en partant du principe que ces derniers transforment certaines œuvres anciennes en films d’anticipation (involontaire), remettant ainsi en question le décalage chronologique propre à la science-fiction, en l’inversant ? Comment le dialogue avec le réel propre au cinéma de science-fiction peut-il alors s’établir ?
Quid de la science-fiction utopique ? Peut-elle encore exister ? L’événement apocalyptique ménage-t-il encore la possibilité d’une vision du monde motivée par la volonté d’en envisager l’amélioration ?
Quel impact pour la science-fiction militaire, sachant que le terrorisme lui impose une représentation de l’ennemi comme entité non localisable, résistant à l’identification, et pouvant se cacher n’importe où ? Comment la science-fiction projette-t-elle de futurs conflits en fonction de cette nature atypique du « méchant » ? Quelle image la science-fiction post 11 septembre donne-t-elle des campagnes militaires, irakiennes en particulier, comme la science-fiction des années 50 évoquait un autre type de guerre atypique, dénommée « froide » ? Quel impact, plus généralement, sur la représentation de l’autre ? de l’étranger ? du conquérant ? de l’envahisseur ?
Modalités de soumission
Des propositions de 300 mots et un court cv sont à envoyer à Lori Maguire (Université de Paris 8) et à Sébastien Lefait (Université de Paris 8) à cinemasciencefiction@gmail.com
avant le 30 novembre.
Les propositions acceptées feront partie d’un numéro de CinemAction. Toute proposition doit donc être en français et la version finale devra comporter 20 000 signes (environ 3250 mots), en vue de sa publication.
Coordination
Lori Maguire, PR, Université Paris 8, EA 1569 (Transferts critiques et dynamiques des savoirs)
Sébastien Lefait, PR, Université Paris 8, EA 1569 (Transferts critiques et dynamiques des savoirs).