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Appel à communications, colloque "Les médias en Afrique subsaharienne et au Maghreb. Formes discursives, publics et enjeux démocratiques", Faculté des Lettres Université de Berne (Suisse), 13-15 juin 2013
Depuis les années 90, suite au mouvement de démocratisation et à la fin du monopole d’une
information étatique dans beaucoup de pays, les médias ont connu une importante évolution
en Afrique. À côté des journaux gouvernementaux, une nouvelle presse écrite privée a vu le
jour. Ainsi en 2004, selon l’institut Panos, on dénombre près de 200 journaux en République
Démocratique du Congo. Tout en restant le média africain privilégié, la radio s’est
considérablement diversifiée avec la mise en place de réseaux commerciaux, associatifs et
confessionnels. Des stations comme Oxyjeunes au Sénégal, Radio Familia FM, La Voix de
l’Afrique en Guinée ou Medina FM au Maroc témoignent d’une telle libéralisation de la
parole radiodiffusée. Bien qu’encore majoritairement étatique et fortement influencée par les
programmes occidentaux, la télévision a vu l’éclosion de chaînes thématiques, régionales et à
péage, comme l’attestent les exemples de la Tunisie, de la Côte d’Ivoire, de Madagascar ou de
bon nombre d’autres pays africains. Quant à l’internet, si son taux de pénétration est encore
très disparate (40 % au Maghreb contre 7 % en Afrique subsaharienne en 2010), il bénéficie
d’une progression rapide, notamment à travers le succès des cybercafés, l’essor de réseaux
sociaux comme Facebook et la création de cyberjournaux, comme leFaso.net (Burkina),
Madanews (Madagascar) ou Nettali (Sénégal). Cette expansion et cette reconfiguration des médias en Afrique sont cependant entravées par plusieurs obstacles, parmi lesquels figure le
manque de ressources financières et matérielles, sans parler des limitations à l’information
imposées par divers pouvoirs africains (suspensions administratives, procès, contraintes
juridiques restrictives, censure…).
Le but du colloque est d’analyser et de confronter les productions discursives en français,
liées à cette mutation du paysage médiatique en Afrique subsaharienne et au Maghreb. Portant
sur les médias que sont la presse écrite, la radio, la télévision, la publicité et l’internet, ainsi
que sur leur appropriation par des publics, ce colloque s’adresse aux spécialistes en sciences
du langage, en analyse du discours, en sciences de l’information et de la communication. Il est
également ouvert aux sociologues et aux politologues intéressés par les rapports entre le
discours médiatique et la gestion de l’espace public. Les contributions pourront aborder les
questions suivantes. Leur liste n’est pas exhaustive :
– dans quelle mesure les nouveaux discours médiatiques africains développent-ils une
communication de proximité qui tranche avec la teneur formelle et académique des médias
traditionnels ? Ce changement de paradigme peut être examiné à travers les processus
d’oralisation, d’interactivité ou d’implication énonciative mis en scène dans des productions
médiatiques typiques (émissions radiophoniques, débats télévisés, blogs, forums, etc.) ;
– comment les discours médiatiques qui prévalent actuellement en Afrique subsaharienne et
au Maghreb gèrent-ils les interférences du français avec les langues nationales ? Ces
discours médiatiques se traduisent-ils ou non par une appropriation africaine du français ? Les
contributions pourront mettre l’accent sur les formes hybrides (phonétiques, lexicales,
syntaxiques…) présentées par de tels discours, en particulier dans la presse écrite, la radio ou
la publicité. Elles pourront encore évaluer l’interculturalité, mais aussi la construction de
nouvelles identités africaines révélées par ces hybridations langagières. On s’interrogera par
ailleurs sur la fonctionnalité différenciée du français et des langues nationales selon les
médias concernés et les contextes de communication ;
– l’effervescence médiatique actuelle sur le continent africain favorise-t-elle le
développement de certains genres de discours ? Outre les formations génériques spécifiques
à l’internet, on pourra s’intéresser, entre autres, à l’émergence d’une presse populaire (comme
Ivoir’Soir) ou satirique (voir Le Cafard libéré, Gbich, Le Lynx…), de même qu’à la
diversification des affiches et des enseignes publicitaires. Des études de cas sur les
caractéristiques de ces genres et sur leur adaptation au paysage africain seront également les
bienvenues ;
– comment les discours médiatiques africains réagissent-ils aux contraintes auxquelles ils
doivent faire face ? Celles-ci sont au moins de deux ordres. Sur le plan externe, de tels
discours doivent cohabiter avec ceux des médias internationaux, omniprésents en Afrique
(RFI, TV 5 Monde, Google…). Dans quelle mesure la parole africaine fait-elle entendre sa
différence dans le flux médiatique de la mondialisation ? Sur le plan interne, les médias
africains sont fréquemment soumis à des pressions de la part des pouvoirs en place. Comment
ces pressions sont-elles intégrées dans les stratégies discursives des journalistes et des
producteurs médiatiques (recours à l’autocensure, à l’implicite, à l’allusion, à l’indirection
rhétorique…) ?
– est-ce que la redistribution des compétences médiatiques a un impact sur les discours
produits ? En effet, tant en raison des modifications de l’exercice de la profession de
journaliste, liées à un processus de démocratisation, qu’à celles dues à l’amplification du recours à l’information et à la communication numériques, les frontières entre pratiques
professionnelles et pratiques « profanes » ont tendance à s’estomper. Un tel phénomène peut
se traduire par des mises en cause croisées de la légitimité des acteurs, par un renouveau des
modalités de fixation de l’agenda médiatique, par une redéfinition de règles de conduite ou de
canons discursifs, par l’émergence de nouvelles spécialités (webjournalisme), peut-être
encore par une transformation des programmes de certaines écoles de journalisme. Autant
d’entrées à dominante socio-politique susceptibles de mieux faire comprendre la dynamique
des changements médiatiques en cours ;
– mais qu’en est-il aussi du positionnement des publics, de leurs savoirs et compétences
médiatiques ? Comment s’ajustent-ils aux évolutions contemporaines ? Se reconnaissent-ils
dans ces évolutions et comment se les réapproprient-ils ? Pour répondre à ces questions, il
pourra être fait appel aussi bien aux mesures d’audience et au développement de leur
implantation en Afrique qu’à des études de type qualitatif. En effet, si les mesures d’audience
permettent de saisir des constantes ou des écarts et de les inscrire dans le temps, les études de
terrain ont pour avantage de comprendre autant la complexité du rapport entre les médias et
les dimensions individuelles/collectives de leur usage que les phénomènes de circulation de
l’information à l’intérieur d’un même territoire ou entre territoires, par exemple à l’aune des
perspectives interculturelles et/ou transfrontalières ;
– plus largement, la libération de l’information en Afrique contribue-t-elle ou non à la
démocratisation du continent ? Un tel débat est de nature à alimenter des études concrètes
sur la couverture médiatique d’élections, sur les prises de position d’éditoriaux journalistiques
ou sur le rôle de mobilisation de l’internet. De plus, l’examen du métadiscours des textes
juridiques (législations sur les médias) et administratifs (comme ceux des organes de
régulations ou des observatoires sur la liberté de la presse), ainsi que l’évaluation des
témoignages des acteurs médiatiques eux-mêmes pourront apporter des éclairages pertinents.
Calendrier
• 15 octobre 2012
Date limite pour adresser les propositions de communication (titre et résumé d’environ 2 500
signes, espaces compris) à Marc Bonhomme : marc.bonhomme@rom.unibe.ch
• 15 novembre 2012
Réponse du comité scientifique du colloque et diffusion du pré-programme.
Quelques repères bibliographiques
C. R. Abolou, Langues et médias en Afrique noire francophone, Sarrebruck, Éditions Universitaires
Européennes, 2011.
A. Ba, Télévisions, paraboles et démocraties en Afrique noire, Paris, L’Harmattan, 1996.
S. T. Balima & M. Mathien (éds), Les Médias de l’expression de la diversité culturelle en Afrique, Bruxelles,
Bruylant, 2012.
F. D. Diallo, « Imaginaire linguistique et création verbale dans le satirique guinéen Le Lynx », in M. Ngalasso-
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M.-S. Frère, Presse et démocratie en Afrique francophone, Paris, Karthala, 2000.
F.-M. Gandon, « Appropriation et syntaxe du français écrit dans la presse de Ouagadougou (Burkina Faso) :
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A. B. Kebe, « La wolofisation du discours journalistique au Sénégal », in A. O. Barry, Discours d’Afrique, t. 1,
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A. Lenoble-Bart & A.-J. Tudesq (éds), Connaître les médias d’Afrique subsaharienne, Paris, Karthala, 2008.
A. Lenoble-Bart & A. Chéneau-Loquay (éds), Les Médias africains à l’heure du numérique, Paris, L’Harmattan,
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A.-J. Tudesq, L’Afrique parle, l’Afrique écoute : les radios en Afrique subsaharienne, Paris, Karthala, 2002.
Comité scientifique
Sabeh Ayadi (Institut Supérieur des Sciences Humaines de Tunis, Tunisie)
Alpha Ousmane Barry (Université de Franche-Comté, France)
Marc Bonhomme (Université de Berne, Suisse)
Zohra Bouchentouf-Siagh (Université de Vienne, Autriche)
Marcel Burger (Université de Lausanne, Suisse)
Andrée Chauvin-Vileno (Université de Franche-Comté, France)
Moussa Daff (Université Cheikh Anta Diop, Dakar, Sénégal)
Emmanuelle Danblon (Université Libre de Bruxelles, Belgique)
Jules Duchastel (Université UQAM, Canada)
Pierre Fandio (Université de Buyoya, Cameroun)
Béatrice Fleury (Université de Lorraine, France)
Thierry Herman (Universités de Lausanne et Neuchâtel, Suisse)
Martin Kouadio (Université de Cocody, Côte d’Ivoire)
Fatima Zohra Lalaoui Chiali (Université d’Oran, Algérie)
Omer Massoumou (Université Marien Ngouabi, Brazzaville, Congo)
Sanda Mounkaila (Université de Niamey, Niger)
Auguste Moussirou-Mouyama (Université Omar Bongo, Libreville, Gabon)
Musanji Ngalasso-Mwatha (Université Bordeaux 3, France)
Adrien Ntabona (Université de Bujumbura, Burundi)
Michael Rinn (Université de Bretagne Occidentale, Brest, France)
Corinne Rossari (Université de Fribourg, Suisse)
Sylvie Thiéblemont-Dollet (Université de Lorraine, France)
Jean-Marie Viprey (Université de Franche-Comté, France)
Jacques Walter (Université de Lorraine, France)