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Appel à communications, Colloque international,"Culture et (in)dépendances Les enjeux de l’indépendance dans les industries culturelles", Paris 26-27 novembre 2015

Date limite : 15 mai 2015
La revendication de l’indépendance a pris une importance grandissante au sein de secteurs aussi divers que l’audiovisuel, l’édition, le cinéma, la musique, ou encore le journalisme. Une position qui est généralement opposée, avec des nuances importantes selon les secteurs, au modèle « dominant » ou mainstream incarné par les « grosses structures » (grands groupes, majors, circuits…) et les pratiques qui leur sont associées. La spécificité des indépendants, que ce soit en termes de contenus produits ou diffusés, de façon de travailler ou de rapports aux créateurs et aux publics, est alors érigée en modèle mis en danger par un certain nombre de « dérives » : la difficulté d’accès au marché pour les plus fragiles, un cycle de rentabilité des biens de plus en plus court, une « offre saturante », la remise en cause de la « diversité culturelle », l’uniformisation des contenus, etc. L’objectif du colloque est de sonder le rôle et la signification de la revendication d’indépendance aujourd’hui à l’œuvre dans les industries culturelles à travers l’analyse des usages sociaux qui en sont faits, en veillant à les articuler dans leurs dimensions tant économique, que politique et artistique. En effet, loin de renvoyer à une définition univoque et stabilisée, le thème de l’indépendance constitue un important enjeu de luttes dans différents secteurs culturels et médiatiques.
L’indépendance compte parmi les concepts les plus mobilisés par les acteurs des industries culturelles et des médias qui parlent de cinéma, d’édition, de label musical, de festival, de journalisme… indépendants. Or, en cherchant à dépasser la posture indigène et normative qui opposerait les « petits indépendants », forcément vertueux, aux grands groupes et aux majors, ce colloque a pour ambition d’aborder la notion d’indépendance en analysant les différentes modalités de sa mobilisation par des acteurs variés. L’indépendance est donc ici envisagée avant tout comme une construction sociale fortement dépendante des environnements institutionnels et marchands propres à chaque secteur et comme un important enjeu de luttes dans ces espaces sociaux. Parallèlement à ce travail de définition, il s’agira de mettre en évidence les effets propres de la mobilisation de ce « label », que ce soit en termes de compétition marchande, d’accès à des subventions ou de conformité à des valeurs plus ou moins explicitées.
Nous souhaitons confronter des travaux empiriques émanant de différentes disciplines portant sur plusieurs secteurs culturels, artistiques ou médiatiques, afin de comparer les pratiques et les représentations en vigueur dans des univers confrontés à des contraintes proches. Il s’agira d’interroger les frontières de l’indépendance en articulant notamment ce que les acteurs en disent, la façon dont ils mettent en scène et en mots cette propriété, avec la façon dont ils la mobilisent en actes dans leur pratique professionnelle.
Le projet consiste ainsi à examiner la façon dont l’idée d’indépendance irrigue et structure des secteurs culturels généralement étudiés séparément, les logiques de filières l’emportant sur les analyses transversales, que ce soit en sociologie, en économie de la culture ou en sciences de l’information et de la communication, en raison de logiques de spécialisation par ailleurs compréhensibles. Enfin, ce colloque entend proposer une perspective internationale, dans la mesure où la notion d’indépendance varie fortement en fonction des cadres institutionnels et juridiques, mais aussi des traditions dans lesquelles s’inscrivent les acteurs – notamment pour ce qui est des relations à la puissance publique. Afin de répondre à cette problématique générale, les communications de ce colloque pourront s’inscrire dans l’un des axes suivants :

1. GENEALOGIE ET QUANTIFICATION DE L’INDEPENDANCE
Les communications de cet axe chercheront à mettre en évidence la genèse de la catégorie d’indépendance, soit dans les industries culturelles en général, soit dans un secteur particulier. Historiciser ce concept permet de mettre à distance la situation actuelle présentée comme inédite en montrant comment, dans le temps, le principe d’opposition « indé » vs. « mainstream » s’est progressivement imposé.
Cet axe s’intéressera en outre à la multiplicité des définitions possibles de l’indépendance, qu’on l’envisage à partir de critères économiques, juridiques, géographiques, en fonction de la place des structures indépendantes dans l’espace des productions et des consommations culturelles, ou de leurs formes organisationnelles. La confrontation des différentes disciplines permettra de mettre en évidence des convergences ou des décalages disciplinaires dans l’appréciation du phénomène.
Enfin, les communications visant à quantifier le phénomène de l’indépendance permettront d’appliquer ces définitions de façon sectorielle ou transversale. L’exposé du choix méthodologique des critères de qualification des structures indépendantes par opposition aux acteurs dominants sera ainsi l’occasion de tester les différentes définitions de l’indépendance.

2. VALEURS, CONTENUS ET PUBLICS DE L’INDEPENDANCE
Un deuxième axe s’intéressera aux valeurs mobilisées par les acteurs indépendants. La mise en avant de l’engagement, de la vocation, de la « passion » ou du désintéressement et la célébration, dans certains cas, d’une culture de la marginalité et de la précarité typique de l’artiste semblent être des caractéristiques centrales de la pratique indépendante. Existe-t-il des valeurs qui seraient « intrinsèquement » liées à l’indépendance ? Le désintéressement est-il systématiquement prôné, quel que soit le secteur d’activité ou observe-t-on de fortes variations ? Quels sont les modèles valorisés ? Comment s’articulent les différentes définitions de l’indépendance, qu’elle soit économique, éditoriale ou politique ?
Le choix de l’indépendance est par ailleurs indissociable d’une revendication de réaliser, produire ou distribuer des contenus « pas comme les autres », qui ne pourraient exister en dehors des circuits indépendants, et qui contribuent de ce fait à maintenir une diversité indispensable dans des sociétés ouvertes et démocratiques. Il importe de cerner les implications de l’identité d’indépendant en termes de contenus et d’esthétique mobilisée. Une attention particulière sera portée à la diversité des termes utilisés pour qualifier les acteurs et les contenus « indépendants » selon les secteurs et les marchés considérés : alternatif, indie, artisan, underground, d’avant-garde, specialized, « de niche », durable, « de création »… Les usages sémantiques sont autant d’enjeux de lutte selon les filières et les contextes, chaque terme révélant en creux un antonyme spécifique au secteur considéré ; cette attention au vocabulaire mobilisé permet de problématiser des oppositions indigènes et des frontières établies. Par conséquent, il conviendra de se demander s’il existe une esthétique typiquement indépendante, ainsi que des formes et des genres repérables au sein de chaque secteur, ou transversaux aux industries culturelles.
Enfin, les travaux portant sur la réception et sur les effets du label indépendant sur la « demande » trouveront également leur place dans cet axe. Comment l’indépendance se donne-t-elle à voir, se transmet-elle aux publics ? Par le biais de quelle(s) expérience(s) ? Par l’intermédiaire de quelles pratiques distinctives ? Comment le terme est-il compris, pris en compte par les « consommateurs culturels » ?

3. PRATIQUES DE L’INDEPENDANCE
Que signifie, très concrètement, être un acteur indépendant aujourd’hui dans le domaine culturel et médiatique ? Quelles contraintes – mais aussi quelles marges de manœuvre – cette forme d’organisation entraîne-t-elle ? Comment est mise en œuvre, pratiquement, l’indépendance revendiquée ? Quelles sont les stratégies alternatives développées ?
De manière schématique, deux stratégies se détachent dans ces univers : celle, d’une part, de la professionnalisation, et celle, d’autre part, de la taille (« rester petit afin de rester libre »). Le refus du développement, lequel est associé au reniement des valeurs et à la perte de contrôle de l’outil de travail, est répandu chez de nombreux petits producteurs. Ce type de rapport à l’économie évoque celui des artisans, auquel renvoie l’idéal du « travail bien fait », de la petite taille, ainsi que le fait de « ne rendre de comptes à personne ». Dans d’autres cas, la professionnalisation est au contraire vécue comme un prérequis indispensable à la pérennisation de l’activité et à l’exercice d’une « véritable indépendance », à égale distance de la puissance publique et des acteurs dominants.
La porosité de la frontière entre amateurisme et professionnalisme est un élément important à prendre en compte dans ce type d’univers, où de nombreuses structures évoluent très rapidement de l’un à l’autre, conjuguant parfois un grand professionnalisme sur le plan technique avec tous les signes de l’amateurisme dans l’organisation (absence de rémunération, maintien d’une activité alimentaire en parallèle). La nécessité de se démarquer des pratiques amateures revêt un caractère crucial au moment où ces dernières gagnent en importance dans l’environnement numérique et où les intermédiaires culturels doivent plus que jamais justifier leur fonction.
Il est enfin utile de s’interroger sur les modes de vieillissement des structures indépendantes qui posent la question du maintien, sur le long terme, des principes ayant présidé à leur création et reflètent les reconfigurations en cours dans les différentes filières des industries culturelles.

4. DIMENSIONS POLITIQUES DE L’INDEPENDANCE
Cet axe invite à explorer les dimensions politiques de la revendication d’indépendance, la politique étant ici entendue, d’une part, comme forme spécifique d’engagement et, d’autre part, comme stratégie dans un secteur particulier pour y « faire sa place ». Les structures se définissant comme indépendantes se caractérisent en effet souvent par la mise en avant d’un engagement dont la dimension politique est plus ou moins marquée. La volonté affirmée de « travailler autrement », l’exaltation de la qualité humaine des relations avec les auteurs et le public, du « temps long » d’une relation authentique opposée aux « coups » commerciaux superficiels des grands groupes ou des majors sont des topiques récurrents dans ces univers. Les indépendants s’inscrivent ainsi souvent dans une stratégie de distinction du « petit contre le gros », de l’artisan contre l’industriel, qui a des conséquences concrètes dans les pratiques, pensées dans le registre vocationnel. L’articulation entre types d’organisation, modes de « présentation de soi » et affirmation de l’indépendance au niveau politique constitue un point central de ce colloque.
Les frontières de l’indépendance sont en outre très liées aux diverses formes qu’a prises la « politique culturelle » après-guerre et qui a, dans une certaine mesure, consisté à soutenir un secteur « à côté » ou « aux marges » du marché, au nom, notamment, de l’ « exception culturelle ». C’est pourquoi on peut affirmer que l’action publique a largement défini les cadres qui rendent aujourd’hui possible l’existence des indépendants ; dans le même temps, la création de syndicats et organisations professionnelles dédiés à la défense de ces acteurs a concouru à la consolidation de cette catégorie. Dans quelle mesure les indépendants utilisent-ils ce « label » pour exister sur un marché ? Quelle rhétorique à destination des instances d’évaluation et de consécration propres à leur univers mobilisent-ils ? Comment l’action publique ou l’action syndicale contribuent-elles à dessiner les contours de l’indépendance ?

MODALITES D’ENVOI DES PROPOSITIONS

Les propositions de communication, de 2 500 signes maximum, devront parvenir au comité d’organisation avant le 15 mai 2015 à l’adresse suivante : colloque.independance2015@gmail.com
Elles feront clairement apparaître la problématique, le terrain et la méthode d’enquête. Elles incluront les éléments suivants :
• Nom, prénom du/des auteur-e-s
• Institution de rattachement
• Discipline(s)
• Adresse mail
• Titre de la communication
• Intitulé de l’axe (ou des axes) choisi(s)
• Résumé de la proposition
• Langue : français ou anglais

CALENDRIER
• 15 mai 2015 : date limite pour l’envoi des propositions de communication ;
• 30 juin 2015 : communication des propositions retenues après évaluation par deux membres du comité scientifique ;
• 20 octobre 2015 : date limite pour l’envoi des textes supports des interventions (20 minutes) au comité d’organisation (pour transmission aux discutants).

Citer cet article : https://www.histoiredesmedias.com/Appel-a-communications-Colloque,5836.html

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