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AAC dossier thématique d’ Arabian Humanities n°11 :"Images et imaginaires urbains : villes de la péninsule Arabique àl’épreuve de leurs représentations"

Date limite : 10 juillet 2017

Coordinatrices : Laure Assaf (EHESS) and Clémence Montagne (ENeC)

Quatre ans après un premier dossier thématique d’Arabian Humanities sur les villes et dynamiques urbaines dans la péninsule Arabique, le présent appel à contributions propose un retour sur les formes d’urbanité propres à cette aire régionale, au prisme cette fois des images et des imaginaires de la ville.

Les propositions d’articles sont invitées à prendre pour objet les représentations suscitées par ces villes – celles projetées et produites par les acteurs institutionnels de la fabrique urbaine, comme celles nées des pratiques partagées des villes par les diverses catégories d’habitants. Les images comme support – avec leurs modèles, leurs attributs symboliques et leurs impensés – pourront ainsi former les matériaux empiriques des études proposées. Les articles pourront également se pencher sur les mises en récit de ces images et leur insertion dans des ensembles de significations collectives, c’est-à-dire dans des imaginaires. Il s’agira d’interroger ce que ces images et imaginaires urbains font aux villes de la péninsule Arabique aujourd’hui.

Du point de vue théorique, cet appel à contributions s’inscrit dans le prolongement d’un courant critique d’études urbaines qui a été, dans la dernière décennie, l’un des moteurs les plus dynamiques du renouvèlement de la recherche en sciences sociales sur la région (Bsheer et Warner, 2013 ; Carapico, 2004). Les travaux consacrés aux villes de la péninsule Arabique ont en effet dessiné une unité propre à cette aire culturelle, au-delà du modèle simpliste de la « ville pétrolière » (Fuccaro, 2001). Ils ont mis au jour les enjeux posés par le développement urbain à travers le rôle de ses différents acteurs mais aussi à travers les conflits qui ont accompagné les transformations des villes de la région (Al-Nakib, 2016 ; Altorki et Bagader, 2006 ; Elsheshtawy, 2008 ; Fuccaro, 2009 ; Kanna, 2011 ; Khalaf, 2006 ; Wippel et al. éd., 2014).

Leurs auteurs ont ainsi fait surgir des « contre-récits » de la ville (Al-Rasheed et Vitalis, 2004), concurrençant les discours officiels à partir de l’étude des réappropriations de l’espace urbain par ses habitants, de leurs pratiques informelles, de leurs connexions transnationales ou encore des formes de détournement et de résistance qui émaillent la vie quotidienne des sociétés urbaines (Beaugrand, 2010 ; Elsheshtawy, 2010 ; Le Renard, 2011 ; Ménoret, 2016 ; Moghadam, 2013 ; Vora, 2013).

Nous proposons de mettre à profit la distance permise par ces travaux, et notamment leur soigneuse déconstruction des récits officiels de la naissance et de la production des villes, pour interroger la prolifération d’images auxquelles celles-ci donnent lieu et les imaginaires différenciés dans lesquels elles s’inscrivent. Quelles images de la ville ont influencé le développement urbain dans la péninsule Arabique ? Comment les modèles importés ont-ils évolué au cours du temps et quels modèles sont aujourd’hui créés par ces villes ? Comment ces images dialoguent-elles avec les imaginaires urbains produits de l’intérieur comme de l’extérieur de la région, par les résidents, les migrants ou les candidats à la migration, les touristes ou bien encore les artistes ?

Les auteurs pourront articuler leur proposition autour de l’un ou plusieurs des quatre axes suivants, ou bien en proposer de nouveaux :

Images incarnées

Un premier axe pourra questionner comment les images produites par les acteurs publics et privés du développement urbain influent sur la « production de l’espace » (Lefebvre, 1974) et se transforment au fur et à mesure que le projet social et politique qu’elles représentent s’incarne dans la matérialité de la ville. De la « vision » des dirigeants dont le vocabulaire hyperbolique est repris à l’envi dans les médias et sur les affiches, jusqu’à la mise en Å“uvre d’un projet de construction, l’image de la ville passe en effet par de multiples étapes. Les auteurs pourront ainsi se pencher sur le vaste spectre de corps professionnels qui participent à façonner ces images, des maquettes et projections en trois dimensions dévoilées au cours de salons de promotion immobilière (Montagne, 2016), à la mise en abime que constituent les images de projets futurs plaquées sur de grandes palissades qui cachent la ville en chantier (Stadnicki et Benchetrit, 2014).

Images projetées

Dans le même temps, on s’interrogera sur le récit de la ville que ces images projettent, et sur les jeux d’échelles parfois contradictoires auxquels elles prennent part, entre construction nationale et branding touristique. Si la fabrique urbaine des villes récentes de la péninsule Arabique a partout servi les projets des détenteurs du pouvoir politique et économique, qui sont souvent confondus, ce processus a emprunté des formes très diverses. A l’image construite par les starchitects occidentaux qui décrivent ces villes du Golfe, et Dubaï en particulier, comme de formidables « laboratoires » d’expérimentation ou des « fééries » architecturales (Koolhaas, 2007 ; Katodrytis, 2005), répond ainsi la réalité de la ville moderniste calquée sur l’urbanisme européen d’après-guerre et déjà presque obsolète au moment de sa mise en Å“uvre (Ménoret, 2016 ; Al-Nakib, 2016 ; Montagne, 2016). A la ville patrimonialisée à travers des complexes hôteliers ou commerciaux qui orientalisent le passé de la région, répond la résilience des projets de logements populaires (buyût sha’biyya) qui ont un temps servi à « contenir » les populations autant qu’à assurer leur allégeance aux nouveaux Etats – mais qui ont aussi suscité des appropriations variées (Cooke, 2014 ; Elsheshtawy, 2016).

Imaginaires citadins

Ces appropriations sont au cœur du troisième axe de recherche proposé, qui s’articulera autour des imaginaires citadins. Les images officielles devront en effet être mises en perspective avec les imaginaires urbains nés de la pratique quotidienne de la ville par ses résidents. Diffusés dans leurs récits de la ville mais aussi dans les images qu’ils en construisent et qu’ils partagent, par exemple sur les réseaux sociaux, ces imaginaires font surgir une autre dimension de l’urbanité, collective, à partir d’une relation à l’espace partagé. Ils mettent parfois en scène la ville passée ou perdue, en employant le vocabulaire de la nostalgie face à la rapidité du développement urbain (Assaf, 2017). Ces imaginaires urbains peuvent aussi véhiculer des significations plus directement politiques, à l’image du rondpoint de la perle au Bahreïn. Détruit par le gouvernement après la répression de 2011, il a ressurgi comme symbole de l’opposition sur internet et à travers les graffitis qui le réinscrivent dans la ville.

Imaginaires artistiques

Enfin, les imaginaires artistiques des villes de la péninsule Arabique constituent un domaine sous-représenté dans la recherche académique. Ils composent pourtant un corpus extrêmement riche et sur une période de temps longue : dès les années 1970, les romans et films kéralais ou égyptiens relatent les expériences de migration vers le Golfe. Ces récits se prolongent aujourd’hui à travers les industries de l’imaginaire – on pense aux liens économiques qu’entretiennent les acteurs et producteurs de Bollywood avec la région du Golfe – mais aussi à travers les courants émergents de jeunes artistes, citoyens et non-citoyens, qui ont grandi dans ces villes et les racontent sous un nouveau jour.

Les propositions d’articles pourront relever des diverses disciplines des sciences humaines et sociales. Les approches ancrées dans des études de cas empiriques seront privilégiées, mais des billets plus courts consacrés à l’analyse d’un corpus d’images ou d’une œuvre littéraire ou cinématographique peuvent être envisagés. Les approches comparatives avec des terrains issus d’autres aires régionales sont également les bienvenues.

Les propositions d’article, en anglais ou en français, doivent être envoyées avant le 10 juillet 2017 aux coordinatrices du dossier, Laure Assaf (laure.assaf@gmail.com) et Clémence Montagne (clemence_montagne@yahoo.fr), ainsi qu’à Sylvaine Giraud (edition@cefas.com.ye).

Les propositions devront inclure :

le titre de l’article,

un résumé de 500 mots,

une courte biographie de l’auteur

toutes les données nécessaires à l’identification de l’auteur : nom, affiliation institutionnelle, adresse professionnelle, téléphone et e-mail.

Calendrier (pour une publication à l’automne 2018) :

- 10 juillet 2017 : Envoi des propositions d’articles

- 2e quinzaine de juillet : Réponse des coordinatrices

- 10 novembre : Envoi d’une première version de l’article complet

Il est demandé aux auteurs de respecter les normes de publication d’ Arabian Humanities. Elles sont exposées dans la note aux contributeurs, disponibles ici ou bien en contactant la secrétaire de rédaction Sylvaine Giraud (edition@cefas.com.ye).

Citer cet article : https://www.histoiredesmedias.com/AAC-dossier-thematique-d-Arabian.html

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