Séminaires
séminaire "Performances Culturelles du Genre" , 6 février 2015
Pour la deuxième séance du séminaire "Performances Culturelles du Genre" (THALIM/CEIAS) qui se tiendra le vendredi 6 février de 14h à 17h à l’INHA (2 rue Vivienne, 75002 Paris), Salle Mariette, nous aurons le plaisir d’accueillir
Mehdi Derfoufi (UNIL/IRCAV)
Omar Sharif, le Prince inquiet de nos désirs. Fabrication et mises en scène d’une masculinité arabe postcoloniale
Omar Sharif est né en 1932 à Alexandrie. Il est souvent présenté comme l’unique star internationale et arabe de cinéma. En réalité, cette affirmation n’est exacte que si l’on considère que l’ensemble des pays arabes et du Maghreb - où des stars comme Farid Al-Atrache et Adel Imam le dépassent en popularité - ne constituent pas un ensemble international. Il faut donc comprendre qu’Omar Sharif est l’unique star arabe de cinéma à avoir élargi ce statut à l’occident, via Hollywood. S’il doit cette évolution de carrière à son rôle dans Lawrence d’Arabie (David Lean, 1962), il ne faut pas oublier qu’Omar Sharif fut d’abord découvert par Youssef Chahine (Le démon du désert, 1954), avant d’épouser l’immense star Faten Hamama, aux côtés de laquelle il tourna plus d’une vingtaine de longs-métrages en Egypte. Il est indispensable de souligner que le cinéma égyptien était alors un des premiers au monde, et se diffusait auprès du grand public dans tout le monde arabe et jusqu’en Inde et en Turquie... Et lorsque Youssef Chahine, le plus occidental des cinéastes égyptiens, présente Ciel d’Enfer au Festival de Cannes en 1954, Jean Cocteau (alors président du jury), s’entiche du jeune acteur. C’est la première "sortie" d’Omar Sharif sur la scène médiatique occidentale, entre "people" et "actualité artistique".
Dans cette communication, je me propose d’analyser la façon dont s’est construite la persona d’Omar Sharif à partir de sa "présentation" au Festival de Cannes 1954, et jusqu’à la fin des années 1970. Le fait qu’Omar Sharif soit la seule star arabe de cinéma à avoir obtenu ce statut en Occident pose la question des "raisons du succès", et plus précisément des mécanismes de ce succès. Or, ces mécanismes se fondent essentiellement sur l’élaboration conjointe (entre les performances de la star elle-même, son utilisation par les réalisateurs et le travail médiatique de la presse généraliste comme de la presse spécialisée) d’une certaine masculinité marquée par l’arabité, l’ambivalence sexuelle, et la séduction romantique conçue à destination d’un public occidental (en particulier féminin). Afin d’analyser ces trois dimensions de la persona d’Omar Sharif - et dans le but de démontrer en quoi cette persona constitue le fondement d’une masculinité arabe postcoloniale soluble dans le bain médiatique occidental -, je m’appuierai sur une sélection de films parmi les plus remarquables de sa carrière, ainsi que sur une étude de la réception médiatique de la star dans la presse française, américaine, et britannique.