Accueil du site > Actualités > Recensions d’ouvrages > Journalistes > Ouvrage : Jean-Marie Charon, Les Journalistes et leur public : le grand malentendu (Vuibert / INA, 2007). Recension par Marie Lhérault.

Recensions d’ouvrages

envoyer l'article par mail title= envoyer par mail Version imprimable de cet article Version imprimable Augmenter taille police Diminuer taille police

Ouvrage : Jean-Marie Charon, Les Journalistes et leur public : le grand malentendu (Vuibert / INA, 2007). Recension par Marie Lhérault.

Dans ce numéro consacré à la peopolisation politique, le dernier ouvrage de Jean-Marie Charon trouve très logiquement sa place. Le titre est explicite : entre les journalistes et leur public, il y a un grand malentendu. Or, le phénomène peopolitique développé dans les pages du Temps des médias n’en constitue qu’un aspect, d’ailleurs évoqué par l’auteur dès la première page de l’introduction. Jean-Marie Charon connaît parfaitement son sujet : ancien formateur en école de journalisme, chargé de plusieurs rapports sur la déontologie des journalistes pour le CSA et le ministère de la communication, l’ancien rédacteur en chef de la revue MédiasPouvoirs est également sociologue des médias, chercheur et enseignant. Avec ce livre paru dans la collection « Comprendre les médias », il dresse un inventaire très complet et propose une réflexion argumentée sur les questions soulevées par la pratique du journalisme ces vingt dernières années. L’ouvrage est construit autour de onze chapitres et d’une partie réservée aux annexes qui visent à exposer le débat public mais également à y contribuer.

Très vite l’auteur rappelle que ce débat n’est pas nouveau, « dans le langage populaire, le journal s’est longtemps appelé « le menteur », pour mieux souligner sa prégnance aujourd’hui. Il rappelle ici les deux événements des années 1989-1991 qui ont cristallisé les dérives du journalisme et ont fait se multiplier les critiques : l’affaire du « faux charnier de Timisoara » et la couverture de la première « guerre du Golfe ». Dès 1987, le « baromètre » sur « la confiance des Français dans leurs médias » met en exergue la méfiance de l’opinion publique envers les médias. Mais c’est l’ensemble de la société, des milieux associatifs aux hommes politiques, des autorités morales, religieuses et intellectuelles aux journalistes eux-mêmes, qui s’interroge. Et les critiques sont nombreuses : la fiabilité de l’information, le choix et la hiérarchisation des sujets, l’importance donnée aux faits-divers, l’inconscience des journalistes, le non-respect des personnes, la logique de scoop mais surtout l’arrogance d’une profession peu prompte à accepter la critique.

Afin de prévenir ces dérives, des réflexions ont été menées notamment par la Commission nationale consultative des droits de l’homme (1995) et le Conseil économique et social (1999) qui ont émis des recommandations. Jean-Marie Charon souligne que leurs propositions se rejoignent autour de trois grands axes : la formation des journalistes, la déontologie des médias, l’instance de sanction susceptible d’agir en cas de manquement aux règles.

Il tente ensuite d’expliquer les réticences des journalistes à mettre en pratique ces recommandations afin notamment de défendre leurs libertés, se prémunir de l’autocensure et surtout ne pas endosser toutes les responsabilités dans un système médiatique en pleine mutation décrit avec force d’exemples par le sociologue.

Et ce n’est que dans son chapitre 5 qu’il expose réellement les termes du grand malentendu en résumant ainsi les objectifs du public « zéro défaut » et ceux des journalistes : « la meilleure information possible avec les moyens dont nous disposons ». Dans les chapitres suivants, il revient dans le détail sur la situation médiatique en France : la variété des conditions de travail et des dispositions mises en place pour résoudre les dérives constatées ; la question de la responsabilité des journalistes, de leur fiabilité quant aux sujets traités et aux sources choisies, mais également leur implication dans des problématiques particulières : la crise des banlieues et la dépolitisation.

Dans un ultime chapitre, Jean-Marie Charon invite à développer les initiatives qui favorisent l’éducation, la critique et les débats autour de la question des médias avant de clore son ouvrage par une partie annexe regroupant avis et chartes professionnelles. Parfaitement documenté et nourri d’exemples, ce manuel permet ainsi de faire le point sur une profession en réflexion.

Marie Lherault

Recension publiée dans Le Temps des médias, n° 10, printemps 2008, p. 244-245.

Citer cet article : http://www.histoiredesmedias.com/Ouvrage-Jean-Marie-Charon-Les.html

Dans la même rubrique