Comptes rendus
Paul Boulland
Les militants et la presse communiste : fabriquer, diffuser, lire l’Humanité et les journaux du PCF de la Libération aux années 1970
Acheter, lire ou diffuser l’Humanité sont des gestes quotidiens de la pratique militante et autour d’eux se structurent différents niveaux d’appartenance et d’intégration à la communauté communiste. L’analyse des chiffres de la diffusion des journaux communistes montre les variations locales de la concordance entre électeurs, adhérents et lecteurs communistes. De fait, entre le lecteur idéal défini par l’institution et les pratiques réelles, des décalages perdurent. La lecture alimente notamment la fracture entre les cadres et les militants de base. Le contexte de crise de l’année 1956 offre sur ces différents terrains un observatoire où se révèlent les rapports profonds des lecteurs au journal communiste. Acte militant par excellence, la diffusion de l’Humanité est un geste essentiel dans la pratique communiste ; il est souvent représenté et valorisé. Critère de l’activité des individus et du collectif, il est de plus l’objet d’une gestion spécifique. Qu’en est-il des acteurs de ce travail militant ? L’analyse proposopographique et biographique nous permet d’étudier les responsables de la presse dans le parti, les journalistes, les administrateurs ou même les employés des journaux. Or la place de ces tâches spécifiques dans la construction des trajectoires et des identités militantes paraît variable. En dehors des responsables du contenu des journaux et de certaines formes de repli militant, il est difficile de distinguer la trajectoire de véritables "militants de l’Humanité". Au contraire, la presse s’intègre très directement à la construction des identités communistes dans la période.