23 - Santé à la Une
Christine Thoër, Michelle Robitaille
Le rôle d’Internet dans la construction des risques relatifs à la consommation détournée de médicaments par des jeunes adultes québécois
Le Temps des médias n° 23, Hiver 2014.L’utilisation des médicaments à des fins détournées semble de plus en plus populaire auprès des jeunes adultes. Cette recherche qui s’appuie sur des entretiens semi-dirigés réalisés avec quarante-six Québécois âgés de 18 à 25 ans qui utilisent les médicaments à des fins de recherche de sensations et d’amélioration de la performance, vise à cerner leurs usages d’Internet pour s’informer sur ces pratiques. Usages et modalités d’appropriation de l’information varient selon les individus qui mobilisent différentes ressources, en ligne et hors ligne, mais consultent peu les professionnels de la santé.
Par Christine THOËR, Professeure à l’Université du Québec à Montréal (UQAM) et chercheure au Centre de recherche sur la communication et la santé (ComSanté).
Michelle ROBITAILLE, Agente de recherche, Centre de recherche sur la communication et la santé (ComSanté), Université du Québec à Montréal.
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On observe depuis une vingtaine d’années, une progression des pratiques de « détournement » de certains produits pharmaceutiques de leurs indications thérapeutiques par les adolescents et les jeunes adultes [1]. Différents médicaments sont concernés, notamment les analgésiques, en particulier ceux contenant des opioïdes (OxyContin, Percocet, Vicodin) et les sirops pour la toux à base de dextromethorphane, qui sont consommés en quantités excessives pour obtenir des états de conscience modifiés [2]. L’usage des psychostimulants comme l’Adderall ou le Ritalin en l’absence de troubles de déficit de l’attention avec hyperactivité (TDAH), semble également en augmentation chez les 18-25 ans, en particulier chez les étudiants qui les utilisent pour améliorer leur performance académique. Ces pratiques concernent 1,5 % à 35 % des étudiants selon les études. Elles sont plus fréquentes dans les collèges du Nord-Est des États-Unis et au sein des universités les plus compétitives [3]. L’utilisation des médicaments stimulants pour améliorer la performance concerne aussi des populations adultes en milieu de travail, mais elle y a été moins documentée.
Internet constitue une source d’information largement mobilisée par les adolescents et les jeunes adultes qui utilisent les médicaments à des fins de recherche de sensations et d’amélioration de la performance [4]. Les sites diffusant de l’information sur les médicaments et les drogues sont nombreux, certains proposant de véritables « guides pratiques » sur les utilisations des médicaments hors du cadre médical. L’information relative aux médicaments utilisés à des fins non médicales circule aussi sur les réseaux socionumériques (RSN) tels que les forums ou Twitter [5]. Sur ces plateformes où les utilisateurs partagent connaissances et expériences des produits, les informations portent sur le choix et l’accès aux substances, leur mode d’utilisation, l’expérience des effets, les moyens d’augmenter les effets des produits ou de réduire les effets non désirés et les risques associés à la consommation des médicaments. Si les contenus des ressources sur Internet et les dynamiques d’échange au sein des RSN ont fait l’objet de plusieurs études, la façon dont les jeunes adultes utilisent les informations qu’ils y trouvent pour ajuster et faire sens de leur consommation des médicaments à des fins non médicales reste peu documentée [6]. Ces pratiques soulèvent des inquiétudes en matière de santé publique et certains chercheurs craignent que les RSN contribuent à leur diffusion auprès des jeunes [7].
L’objectif de cet article est de mieux comprendre comment les ressources Internet sont utilisées par les jeunes adultes (18-25 ans) qui consomment des médicaments à des fins de recherche de sensations et d’amélioration de la performance. Quelles sont les ressources Internet qu’ils privilégient ? Quels types de savoirs recherchent-ils en ligne et comment leurs besoins d’information évoluent-ils au fur et à mesure leur expérience de consommation ? Enfin, comment s’approprient-ils et articulent-ils les différents savoirs recueillis en ligne et hors ligne ?
Nous nous inscrivons dans la perspective de la sociologie des usages [8] qui s’intéresse à l’appropriation et aux significations que construisent les individus autour de leur utilisation des technologies de l’information et des communications. Comprendre les usages d’Internet des jeunes adultes qui consomment des médicaments à des fins détournées, c’est d’abord cerner comment ils accèdent aux contenus, les manipulent, les évaluent, les partagent, et les utilisent pour ajuster leurs pratiques de consommation. Akrich (1996) [9] montre aussi que le dispositif technique qui entoure le médicament (la galénique, l’emballage, la notice du produit et les intermédiaires existant entre l’usager et le médicament) encadre, voire encourage certaines actions des usagers. Toutefois, les individus sont capables d’être créatifs et de contourner les usages prescrits. Nous insistons également sur la dimension temporelle car c’est au travers des répétitions et de l’établissement de certaines séquences de consommation des médicaments, que s’aiguisent la perception des états sensoriels et la volonté et la capacité des acteurs à leur donner sens [10]. Enfin, nous considérons différentes logiques d’usage des médicaments détournés afin de voir dans quelle mesure celles-ci sont associées à des usages particuliers d’Internet.
Quelques précisions méthodologiques
Sur le plan méthodologique, nous avons privilégié une approche qualitative et réalisé des entrevues semi-dirigées avec 46 jeunes adultes québécois, âgés de 18 à 25 ans et ayant consommé des médicaments à des fins non médicales au cours des deux mois précédant l’entretien. Afin de diversifier les logiques d’usage, nous avons recrutés 20 jeunes adultes qui utilisaient le médicament à des fins de recherche de sensations et 26 autres qui le consommaient pour améliorer leur performance académique ou professionnelle [11].
Notre échantillon est composé de 34 hommes et 12 femmes, dont 29 parlaient principalement le français et 17 l’anglais, vivant dans la région du grand Montréal et issus des classes moyennes et supérieures. Deux des participants étaient aux études secondaires, 4 au Cegep, 24 suivaient des études universitaires, 16 étaient sur le marché du travail où ils occupaient des emplois à temps plein ou partiel [12]. Les jeunes que nous avons rencontrés utilisaient différents médicaments à des fins non médicales : des psychostimulants (méthylphénidate, amphétamine, dextroamphétamine), des antidouleurs avec de la codéine (oxycodine, hydrocodone), des antitussifs à base de dextrométhophane, des antihistaminiques (notamment avec de la diphenhydramine) et des décongestionnants (pseudoéphédrine).
Quelques-uns prenaient également des anxiolytiques, des somnifères et des traitements pour les troubles de la dysfonction érectile (Viagra notamment) sans ordonnance. Plusieurs consommaient aussi des drogues illicites (marijuana, cocaïne, ecstasy, speed, kétamine). Il est à noter que certaines des utilisations détournées rapportées s’inscrivent dans des logiques qui ne relèvent pas de vraiment de la recherche de sensations ni de l’amélioration de la performance, mais renvoient à des stratégies d’automédication de problèmes présentés comme des faiblesses personnelles ou un mal être diffus [13].
Les entretiens abordaient les occupations du jeune adulte, la description d’une journée type, la perception de l’état de santé, les contacts avec le système de soins, les médicaments consommés à des fins médicales, les médicaments consommés hors du cadre médical pour améliorer la performance ou obtenir des états de conscience modifiés, les sources d’information sur ces produits et leur utilisation, l’initiation à la consommation, les modalités d’accès aux médicaments, les contextes et les motifs d’utilisation de ces produits, l’expérience des effets et leur évolution dans le temps, les effets non désirés, la perception des risques associés à la consommation de médicaments, les représentations de cette pratique, le rapport entre médicaments et drogues illégales.
Notre analyse s’inspire des procédures de la théorisation ancrée [14], soit d’une approche inductive, avec une analyse simultanée à la collecte des données, qui a amené plusieurs ajouts à la grille d’entretien au cours du projet. Une première lecture des éléments du corpus a permis de dégager les catégories thématiques pertinentes et de produire une grille de codification qui s’est enrichie au fur et à mesure de la collecte des données. L’analyse a été réalisée à l’aide du logiciel N-Vivo.
Les ressources Internet utilisées
L’Internet et les pairs constituent de loin les sources d’informations privilégiées par nos répondants, Internet étant la source la plus largement mentionnée et utilisée dans notre échantillon (35/46). La recherche s’effectue souvent via les moteurs de recherche généraux où les jeunes entrent le nom commercial du médicament (tu peux taper « Adderall » sur Google, pis t’as un paquet de sites différents) et parfois le nom de la molécule, et sur le site Wikipédia. Mais les participants ne s’y limitent pas. Les recherches se poursuivent souvent sur les ressources proposées sur la page de résultats du moteur Google, sur des portails généralistes sur la santé (Passeportsanté.net, Webmd.com, Edoctor.com) et pour plusieurs, sur des sites qui offrent une information spécialisée sur les drogues et les médicaments utilisés à des fins non médicales. Le site Erowid.org est particulièrement apprécié pour la variété des informations qu’il propose.
Erowid est un organisme de recherche et de sensibilisation sur les drogues, leurs usages à travers l’histoire, à travers les cultures, à travers les peuples. Alors ils vont vraiment chercher toutes sortes d’informations au niveau des usages traditionnels (…) autant qu’ils vont chercher de l’information au niveau des composantes chimiques, des effets, des impacts que ça peut avoir (Christian)
Plusieurs consultent des fiches d’information sur les médicaments sur des sites privés (Rxlist.com) ou gouvernementaux comme la base de données sur les produits pharmaceutiques de Santé Canada. Quelques-uns effectuent aussi des recherches sur des bases de données d’articles scientifiques comme le site pubmed.
I just google search the active ingredient like Methylphenidate and usually what pops us is like I don’t know, medical journal entries (…) I don’t read a lot of scientific literature but if it is something I’m taking than you know, I want to know what the effects are. (Frank)
Enfin, plusieurs lisent les forums qui permettent d’avoir accès à des informations très pratiques sur la prise du médicament et aux expériences de « trip » vécues par d’autres usagers.
(sur les forums) Les personnes mettent leurs commentaires : "moi j’ai vraiment aimé ça, j’ai pas aimé ça, ça m’a fait quoi, ça m’a rendu malade". Alors je regarde toujours avant de faire quelque chose. (Zoé)
Mais les avis sur le contenu des forums sont partagés et certains participants sont moins enclins à faire confiance à l’information qui circule sur ces espaces la jugeant non scientifique ou peu pertinente car trop centrée sur les expériences de trip. La très grande majorité des jeunes rencontrés souligne que la qualité de l’information disponible sur Internet est inégale et varie, entre autres, en fonction des acteurs à l’origine des sites. Plusieurs sont plus vigilants lorsque l’information est publiée par l’industrie pharmaceutique. Dans tous les cas, la stratégie est de consulter plusieurs types d’information et de les comparer.
C’est en lisant tout ça, en comparant les commentaires des gens et l’information plus scientifique un peu sur comment ça fonctionne avec le corps humain et tout ça qu’on peut en savoir plus. (Rolan)
Certains indiquent aussi qu’ils multiplient les ressources consultées, voire mobilisent des ressources hors ligne lorsque les informations obtenues sont difficiles à comprendre.
Quand c’est pas clair, je vais voir ailleurs sur un, un autre site. Et si là encore, c’est pas clair, je peux aller voir, oui je vais aller voir quelqu’un, je vais aller m’informer ailleurs que sur Internet. (Franck)
Point important, plusieurs participants rapportent accéder sur Internet à une information différente de celle qui circule dans les médias traditionnels ou dans les campagnes de santé publique.
L’information qu’on trouve dans les journaux, dans les brochures (…) y disent que, qu’il y a des risques énormes. Mais les risques ne sont pas si grands que ça, si la dose est bien administrée. […] Ils font tout un plat avec pas grand-chose et après quelqu’un qui sait ou qui a essayé déjà ne peut plus trouver cette information intéressante là parce que… Moi quand je lis ça, je fais… bah ça vaut… c’est pas… c’est pas « accurate », c’est pas exact… fake ça me donne pas envie de continuer à lire. (…) Je trouve que c’est exagéré. Sur Internet, on trouve de l’information par des gens qui en ont déjà consommé ou des gens qui savent comment elle est faite exactement comme des spécialistes, des chimistes… (…) je trouve que c’est important que les gens puissent avoir de la bonne information sur les médicaments et les drogues. (Patrick)
Types d’informations recherchées aux différentes étapes de la consommation
Internet est utilisé aux différentes étapes de la trajectoire de consommation, le plus souvent en articulation avec d’autres sources d’information, comme nous le verrons plus en détail dans la section quatre. Les ressources sur Internet sont tout d’abord mobilisées au moment de la préparation du projet de consommation. L’initiation à la consommation se fait généralement au contact de pairs ou de connaissances par qui les jeunes entendent parler du médicament, de ses effets, et qui donnent l’occasion d’expérimenter le produit [15]. Plus de la moitié de nos participants ont été initiés par leurs amis ou par des collègues d’études qui leur ont offert un ou plusieurs comprimés et leur ont fourni certaines informations sur son utilisation. Toutefois, ces informations ne sont pas toujours jugées suffisantes et en prévision ou à la suite de ce premier essai (avant de réitérer), ces participants effectuent des recherches sur Internet.
Je l’avais déjà essayé mais (…) avant de commencer à en prendre régulièrement j’ai lu beaucoup pour voir si ça pouvait être dangereux ou quoi que ce soit et j’ai rien vu qui m’a fait vraiment peur (Rolan)
D’autres participants ont seulement entendu parler du médicament ou ont observé sa consommation sur le campus, dans leur milieu de travail ou via leurs amis en ligne ou hors ligne. Ils recourent à Internet pour avoir plus d’information sur le médicament et surtout décider ou non d’en faire l’essai.
La codéine, ça c’est mon frère qui m’en avait parlé. A un moment donné, il avait trouvé ça, il avait vu ça ou il en avait entendu parler sur Internet ou quelque part. Puis il m’avait envoyé le lien alors j’avais commencé à chercher l’information là -dessus puis ensuite, 15 Plus de la moitié de nos participants ont été initiés par leurs amis ou par des collègues d’études qui leur ont offert un ou plusieurs comprimés et leur ont fourni certaines informations sur son utilisation. après avoir fait ma recherche, j’ai décidé d’essayer ça. (Christian)
Pour la grande majorité de ceux qui effectuent des recherches sur Internet au moment de construire leur projet de consommation, l’objectif est avant tout de se renseigner sur les risques associés à la prise du produit, notamment en termes d’abus et de dépendance, de cerner ses effets secondaires, d’en savoir plus sur ses indications et de déterminer le dosage à prendre lors du premier essai.
Moi, j’ai pris la dose moyenne recommandée sur Internet, et ça, c’était correct comme ça, j’ai pas trop eu besoin de chercher. Je prends toujours la même chose, je pense que c’est 15 mg, quelque chose comme ça. (Frank)
L’étendue des recherches réalisées varie grandement d’un individu à l’autre. Certains se contentent de recherches rapides visant à valider que les risques ne sont pas trop importants : « J’ai pas vraiment checké ben gros là -dessus, mais j’ai checké vraiment si ça serait mortel pour la santé ou non, pis ça dit non, ça fait que Ok ! » (John).
Quelques-uns limitent volontairement leur recherches craignant de trouver des informations alarmantes qui les découragent « C’est important (d’être informé) mais d’en savoir trop, c’est pas mieux. [...] Sinon, tu le ferais pas ». (Louis). Deux participants expliquent d’ailleurs qu’ils ne souhaitent pas être inquiétés et ne mènent aucune recherche sur Internet, préférant s’en remettre à l’expérience du produit :
Mettons que j’aurais lu ça là , des gros effets secondaires, probablement que j’aurais eu de l’anxiété relié à ça. (…) On peut imaginer facilement des symptômes là , c’est classique. Donc j’aimais mieux, comme pour toutes les autres drogues que j’ai pris dans ma vie, j’aimais mieux ne pas savoir pis le vivre. (Julie)
A l’autre extrême, plusieurs participants entreprennent une recherche extensive. Ils soulignent l’importance de s’informer pour prendre une décision éclairée avant la prise d’un médicament, que celle-ci se situe hors du cadre médical ou même, sous la supervision d’un médecin.
Tout ce que j’ai consommé, je l’ai toujours fait après avoir fait beaucoup de recherches sur le sujet, consulté des sites spécialisés. (…) j’ai toujours fait très attention à tout ce que je consomme pour vraiment m’assurer (…) de bien connaître ce que je prends (…) pour être capable de juger si tel risque c’est quelque chose que je suis prêt à assumer, que je suis prêt à prendre. (Christian)
Ceux qui font des recherches plus extensives vont souvent être en quête d’informations plus scientifiques sur la composition du produit et ses effets sur le corps et le cerveau, son mécanisme de fonctionnement.
Dans le fond, moi quand je fais de la recherche, je vais surtout voir au niveau de la composante chimique, au niveau des recherches qui ont été faites là -dessus, voir comment ça fonctionne, quelle influence ça l’a pour produire ses effets, tout ça… de quoi c’est dérivé vraiment, pour aller chercher le plus d’informations possibles pour être capable de prendre une décision plus éclairée (Christian)
Il semble par ailleurs que ceux qui consomment les produits à des fins de recherche de sensations semblent plus enclins à se renseigner sur les risques associés à la consommation de ces produits qui leur sont moins familiers.
Les jeunes entreprennent également des recherches sur Internet pour identifier les médicaments obtenus de tiers ou achetés en ligne et s’assurer d’être en possession du produit recherché. C’est notamment le cas quand ils trouvent des médicaments sous ordonnance dans les pharmacies familiales, ceux-ci étant sans emballage produit [16]. La consultation d’Internet vise alors à cerner les indications du médicament et à évaluer son potentiel récréatif.
-C’était un médicament qu’on avait
trouvé dans la pharmacie d’un de mes
amis encore une fois. […] Il voulait en
prendre, il voulait voir c’est quoi que ça
faisait, fake on est allé regarder sur
Internet voir quel effet ça pouvait
produire.
Est-ce que vous l’avez pris ?
Non. Parce que c’était des
médicaments pour sa belle-mère pis je
pense qu’il y avait des hormones
genre… fake on a décidé que c’était
peut-être pas une bonne idée d’en
prendre. (Patrick)
Plusieurs sites, notamment les sites proposant des bases de données sur les médicaments (voir par exemple drugs.com) permettent d’identifier le produit à partir des inscriptions qui figurent sur le comprimé ou de photographies et de valider qu’il ne s’agit pas d’un produit de contrefaçon.
En général, il y a le print sur les pilules pharmaceutiques, c’est assez facile à voir si c’est du Adderall étant donné qu’il y a toute ces petites billes (encoches) qui sont très dures à reproduire dans un laboratoire amateur. (Frank)
Enfin, la recherche sur Internet peut aussi viser à se renseigner sur les moyens de se procurer le médicament. C’était notamment le cas de participants qui voulaient obtenir des médicaments indiqués pour les troubles de la dysfonction érectile ou certains stimulants plus rarement prescrits. Toutefois, la très grande majorité de nos répondants obtenaient les médicaments auprès de pairs qui leur vendaient, leur échangeaient ou leur donnaient les produits.
A la suite des premières expériences de consommation, un tiers des participants rencontrés entreprennent de nouvelles recherches sur Internet. La démarche est alors plus réflexive et vise, en s’appuyant aussi sur les effets expérimentés, à ajuster le dosage afin d’améliorer le trip, à limiter les effets secondaires, à passer à de nouveaux plateaux (par exemple, dans le cas des sirops pour la toux) ou à comparer les effets de différents médicaments. C’est le cas de Sébastien qui travaille dans une pharmacie et procède d’un va-et-vient entre expérience corporelle et lectures sur Internet pour finalement décider de limiter sa consommation au Ritalin, dont il apprécie d’avantage les effets et qui est décrit dans la littérature comme ayant un effet positif sur la santé.
-Comment as-tu décidé que tu prenais le
Ritalin exclusivement ?
Heu j’ai juste [regardé] le bénéfice des
deux en me renseignant sur Internet,
(…) en fait, il y a des études qui laissent
croire que le méthylphénidate pourrait
avoir un effet qui serait même neuroprotecteur,
qui serait presque
bénéfique. J’ai de la misère à y croire
mais... Tandis que les amphétamines
c’est l’inverse, ça augmente la création
de radicaux libres, et les dommages
aux neurones (…). Les amphétamines
je trouve que l’effet est comme trop
intense pis le crash aussi après, genre
tu le sens plus, tandis que
méthylphénidate aux doses que je
prends, j’ai pas vraiment de crash,
peut-être un peu, t’as été un peu plus
réveillé donc tu te sens un peu plus
smooth mais tsais, pas de problème sur
l’humeur ou le soir après, j’ai pas de
problème. Donc c’est vraiment une
question, de ce que je recherche, je l’ai
avec le méthylphénidate, c’est assez
fort, j’ai pas besoin de plus, pis côté
santé, ben ça a l’air de pencher plus
bénéfique de ce côté-là . (Sébastien)
Différentes modalités d’appropriation de l’information trouvée sur Internet
La consultation d’Internet semble constituer un premier pas vers une meilleure connaissance des médicaments et des modalités de consommation hors du cadre médical. Jack qui consulte le site erowid.org souligne que cette démarche s’apparente à une formation de base sur la prise de drogues et de médicaments. Comme plusieurs des participants rencontrés, il juge nécessaire de s’appuyer à la fois sur des connaissances à caractère expérientiel et des connaissances scientifiques.
There is actually a very good web site online called erowid.org where you can do good research. I mean, it’s people experiences, it’s scientific description of what the drug is, like very in details, that’s the two main things, I has like a huge list of every type of things that you can possibly imagine taking, it tells you what exactly it’s doing inside your body, what the side effects are and then there is just people telling you their experience with the drugs so you just kind of do research about it. So I had sort of a general formation in the drug taking.
Les jeunes adultes rencontrés vont en effet généralement confronter l’information trouvée en ligne à leur propre expérience des produits. Par exemple, si Internet aide à choisir le produit et à décider du dosage initial, c’est l’expérience de la prise médicamenteuse qui permet trouver le dosage adapté à son métabolisme.
Maintenant, je fais mes barèmes plus personnellement mais au début c’était les barèmes indiqués sur Internet, mais […] les doses dépendent de vraiment chaque métabolisme alors, je pense pas que une dose sur Internet soit vraiment valide pour tous les individus. (Mica)
La compréhension et l’évaluation de l’information trouvée sur Internet peuvent aussi s’appuyer sur l’expérience du médicament consommé sous supervision médicale. Un des participant diagnostiqué et médicamenté pour un trouble de déficit de l’attention lorsqu’il était enfant, affirme ainsi se fier à ses connaissances et ses expériences préalablement acquises pour interpréter l’information en ligne.
L’appropriation de l’information recueillie en ligne, comme les usages d’Internet, varie largement d’un individu à l’autre, en fonction notamment du degré d’expertise des participants. D’un côté, se trouvent des individus qui affirment ne détenir et souvent ne souhaiter obtenir que peu de connaissances sur le produit et ses indications. Ceux-ci limitent le spectre de leur recherche, s’appuyant principalement sur leur expérience du produit pour interpréter les effets et ajuster leur consommation. A l’autre extrême, on trouve des participants qui témoignent d’un réel intérêt à comprendre les effets sur l’organisme des médicaments et des drogues et passent de nombreuses heures à faire des recherches en ligne sur la composition chimique des produits et leurs modes d’action, consultant les monographies des médicaments et la littérature scientifique. Plusieurs de ces participants font état d’une proximité avec le savoir scientifique du fait de leurs études (psychologie, pharmacologie, chimie) et parfois un accès facilité aux médicaments (emploi comme technicien en pharmacie, emploi bénévole dans un organisme de prévention en toxicomanie, membre de la famille soignant). Ils combinent savoirs expérientiels et connaissances scientifiques pour être en mesure d’exercer un regard critique sur l’information disponible en ligne. Quatre participants qui s’affirment comme experts dans leur communauté, vont plus loin et relaient dans leur entourage, l’information recueillie au travers de leurs lectures et de leurs expérimentations. Christian qui travaille comme bénévole dans un organisme d’information sur les drogues et les médicaments, effectue des recherches pour le compte de ses amis et connaissances. Éric qui travaille dans une pharmacie, réalise beaucoup de recherches en ligne sur les médicaments et se considère comme un alchimiste. Il invente et prépare des « recettes » en associant différents médicaments qu’il récupère dans la pharmacie et offre ces cocktails à ses amis qui apprécient son expertise et profitent de son accès privilégié aux produits. Il apparaît ainsi qu’en plus de l’appropriation de savoirs experts, ces participants sont en mesure de produire des connaissances uniques qu’ils diffusent dans leur entourage et sur les forums Internet où deux d’entre eux sont actifs. Ce statut d’expert est assorti de marques de reconnaissance mais aussi de responsabilités :
Moi je me porte garant (…) de la recette là . (…) pis d’ailleurs c’est ça qui était marrant les premières fois (…) pourquoi y a comme quatre comprimés ? Pourquoi ils sont pas de la même couleur, pis ci, pis ça, pis là il faut tout que j’explique, tu sais, pis ça me fait plaisir là . (…) Pis après, ils sont convaincus. Ils me font confiance anyway (…) moi je connais ça parce ça m’intéresse pis parce que je travaille là -dedans (Éric)
Sans la nommer comme telle, tous ces usagers experts prônent une approche qui s’apparente à la perspective de réduction des méfaits et visent à permettre aux jeunes de leur entourage d’exercer une prise de décision éclairée. Ils insistent sur la nécessité de diffuser la « bonne information » pour permettre aux individus d’agir en « drogués informés ».
Moi, quand j’interviens (dans les forums, je donne toujours… j’essaie toujours de donner des références, de dire à la personne bien regarde, y a ça, y a ça, y a tel risque, mais moi je me garde toujours de faire des commentaires personnels ou de donner une opinion parce que je veux la personne puisse … Regarde si tu veux essayer quelque chose, essaye-le mais… suis ton intuition…ton propre jugement. (Christian)
Usages d’Internet et articulation avec d’autres sources d’information
Si Internet est largement utilisé par les participants que nous avons rencontrés, ce n’est pas la seule source d’information qu’ils mobilisent. Ils consultent aussi les informations sur l’emballage et les notices produits quand elles existent et surtout, obtiennent des renseignements sur les médicaments et leur utilisation auprès de leurs pairs, notamment ceux qui détiennent une expertise scientifique.
My girlfriend is a... She was a physic major but she’s going into psychology so does a lot of research, she knows a lot about, you know different drugs and prescription drugs. So mostly I just ask her but I also go online and find medical information about it. (Franck)
Plusieurs mentionnent aussi poser des questions à certaines personnes de l’entourage (frère ou sÅ“urs, adultes de leur famille ou de celle de leur amis) et notamment à ceux qui entretiennent une proximité avec le système de santé, voire y travaillent (infirmière, pharmacien, médecin, biochimiste, chercheur en toxicomanie). Ils valorisent ces échanges avec des professionnels détenant une expertise scientifique, qui leur sont facilement accessibles et en qui ils ont confiance. Mis à part ces adultes, ils discutent assez peu de leur consommation de médicaments à des fins non médicales avec leurs parents jugeant que ceux-ci ne comprendraient pas leurs pratiques. Trois jeunes ont aussi mentionné avoir discuté avec des intervenants ou des bénévoles d’un organisme de prévention dans le cadre d’événements « rave ». Ces intervenants sont jugés très accessibles ; ils offrent beaucoup d’information sur les médicaments et s’inscrivent dans une approche de réduction des méfaits qui est appréciée.
En dehors de l’entourage, les professionnels de la santé et notamment les médecins semblent par contre peu mobilisés par les jeunes adultes concernant les médicaments utilisés à des fins non médicales. Tout d’abord, plusieurs des participants rencontrés expliquent avoir un accès limité aux professionnels. Ils n’ont pas de médecin de famille qui les suive et ne savent pas trop où aller en dehors des cliniques de consultation sans rendez-vous.
Certains participants qui prennent des psychostimulants ont tenté d’obtenir de l’information et une prescription auprès de leur médecin, espérant que ce professionnel pourrait les aider à identifier le dosage adapté à leur métabolisme. Ils rapportent un accueil peu enthousiaste du médecin consulté qui selon eux, ne comprend pas ou condamne leur prise de médicaments hors du cadre médical. (Mes médecins), ils comprennent pas vraiment pourquoi je les prends (des stimulants), il pense que j’en aurais pas besoin, que c’est mieux que j’en prenne pas à cause de ma santé mentale mais moi je préfère, je voudrais qu’ils me donnent le plus d’informations possibles pour que je puisse savoir quelle est la meilleure pilule à prendre, pour mon cas (…) mais c’est difficile d’en parler au docteur.
Un autre participant qui a effectué des recherches sur Internet et décidé d’utiliser des médicaments stimulants parce qu’il considérait présenter tous les symptômes du TDAH, rapporte lui aussi que le médecin n’était pas très réceptif à l’autodiagnostic qu’il avait posé et à sa demande d’une ordonnance.
[…] J’ai demandé à mon médecin, la dernière fois que je l’ai vu […] je lui ai expliqué que j’avais déjà essayé le méthylphénidate pour des examens, je lui ai expliqué […] que vraiment, je scorais assez élevé sur l’échelle de troubles d’attention chez l’adulte, que j’ai été me chercher sur Pubmed. […] Je lui ai expliqué que j’aimerais ça avoir une prescription pour en prendre au besoin, il n’était pas très ouvert (Sébastien).
D’autres ne consultent pas de professionnels de la santé ou ne révèlent pas leur consommation de médicament à des fins non médicales pour éviter le regard moralisateur des soignants ou parce qu’ils craignent d’être étiquetés comme ayant un déficit de l’attention (pour ceux qui prennent des stimulants). Plusieurs participants considèrent aussi que leur consommation de médicaments à des fins non médicales constitue un choix personnel : « Moi je pense que chacun devrait avoir le droit de décider... si oui ou non ça peut l’aider telle amphétamine ou pas. » (Andréi)
Ne pas recourir aux professionnels de la santé peut aussi s’inscrire dans un questionnement de l’expertise de ces professionnels lorsque les médicaments sont utilisés en dehors de leurs indications. Deux participants déclarent ainsi que leurs connaissances dépassent celles des médecins et des pharmaciens parce qu’ils se sont plus documentés sur les usages de ces médicaments à des fins non médicales et en ont personnellement fait l’expérience.
Enfin, quelques participants témoignent d’une certaine méfiance à l’égard des médicaments, de la médicalisation du TDAH, et du rôle que jouent les médecins dans ce processus.
I don’t trust doctors. (…) Je pense pas qu’ils sont...qu’ils savent tout. Donc, je pense que je devrais faire plus de recherche sur le Concerta et le Ritalin. Oui, juste parce que c’est pas vendu sur la rue ça veut pas dire que c’est bon, you know. T’sais comme pour eux autres, les médicaments c’est un gros racket aussi là . T’sais là , ils en prescrivent à la peltée pis t’sais c’est juste pour faire de l’argent en quelque part […] Je sais pas là , je les truste pas. C’est sûr qu’ils ont été à l’école, ils ont étudié pis ils connaissent ça, mais ils ont tout le temps une motivation monétaire en arrière quand qu’ils prescrivent de quoi eux autres. (Alexandre)
La majorité des personnes rencontrées considère toutefois que les médicaments sont plus sécuritaires que les drogues illégales parce qu’ils sont produits dans des laboratoires contrôlés et font l’objet d’essais cliniques. L’expertise des médecins reste aussi globalement valorisée et c’est plus souvent le fait que ces professionnels soient peu accessibles ou peu réceptifs concernant les utilisations des médicaments à des fins non médicales qui explique qu’ils soient moins consultés.
Conclusion
Internet est une ressource largement utilisée par les jeunes adultes que nous avons rencontrés pour obtenir des informations sur les médicaments qu’ils consomment à des fins non médicales. La consultation d’Internet intervient le plus souvent après que ceux-ci aient entendu parler du médicament par des pairs, en prévision ou dans les premiers temps du projet de consommation. Internet constitue une source appréciée du fait de l’accessibilité en tout temps de l’information et de son caractère anonyme, la consommation à des fins non médicales n’étant pas facile à discuter avec les parents ou les professionnels de la santé. Ces caractéristiques d’Internet sont valorisées par les adolescents et les jeunes adultes concernant d’autres questions de santé sensibles telles que la santé mentale, la sexualité ou la consommation de drogues illégales [17]. Par ailleurs, Internet est présenté comme une ressource qui permet d’accéder à des informations à caractère scientifique, pratique et expérientiel. Les jeunes trouvent notamment en ligne des informations qu’ils qualifient de « plus réalistes » et jugent particulièrement utiles pour évaluer les risques associés à la consommation de médicaments à des fins non médicales. Ils restent toutefois vigilants à l’égard de l’information qui circule sur Internet et développent certaines stratégies pour l’évaluer en consultant différentes sources, en ligne comme hors ligne, et en confrontant les informations recueillies en ligne à leur expérience personnelle d’utilisation des médicaments à des fins médicales et non médicales.
Les usages d’Internet et les modalités d’appropriation des informations recueillies en ligne varient toutefois largement selon les individus. Si certains poussent loin leurs recherches sur Internet, d’autres n’en font pas du tout, comme c’est aussi le cas pour d’autres thématiques de santé. Pour la très grande majorité de nos participants les recherches portent principalement sur les risques associés à la consommation détournée des médicaments Nos résultats confirment ainsi ceux de Quintero et Bundy [18] qui montrent que si l’usage d’Internet contribue sans doute à diffuser les pratiques de consommation des médicaments à des fins non médicales, il favorise surtout l’encadrement des risques qui y sont associés.
Parmi les participants rencontrés, quatre d’entre eux s’affichaient comme experts. Ils cumulaient un savoir scientifique acquis dans le cadre de leurs études ou de leur travail dans ce domaine, et au travers de leurs nombreuses recherches d’information et de leur expérimentation des produits. Le processus de va-et-vient entre ces différents types de savoir leur permettait de produire de nouvelles connaissances sur les produits à détourner, les combinaisons de produits intéressantes et leurs effets. Ces individus se distinguent par leur volonté affichée d’aider leurs pairs et de diffuser leurs connaissances, ce qui leur vaut une certaine reconnaissance dans leur communauté et sur les espaces d’échange en ligne où certains sont actifs [19]. Les professionnels de la santé, médecins ou pharmaciens, sont par contre beaucoup moins mobilisés sauf s’ils gravitent dans l’entourage des jeunes. Pour une partie des participants rencontrés, il ne s’agit pas d’un rejet de l’expertise clinique ni d’une remise en question de la confiance en ces professionnels, mais plutôt d’une problématique d’accès à ces acteurs et d’une crainte (parfois éprouvée) que ceux-ci n’agissent comme des « entrepreneurs de morale » [20] Pour d’autres jeunes adultes rencontrés, l’usage d’Internet permet d’accéder à une information alternative concernant les médicaments, favorise une nouvelle perception des risques associés à leur consommation à des fins non médicales et entraîne une prise de distance à l’égard des experts traditionnels [21]. Plusieurs des participants considèrent en effet que l’expertise des cliniciens est limitée quand il s’agit d’utiliser le médicament hors de ses indications thérapeutiques. Par ailleurs, ils soulignent que l’expertise légitime en matière d’utilisation de médicaments détournés nécessite le cumul et l’articulation de différentes formes de savoirs (scientifique et expérientiel. Ainsi, comme le souligne Pols [22], il importe de ne plus opposer systématiquement le savoir du médecin à celui du patient, celui de l’expert à celui du profane, d’une part parce que ces deux types de savoir se complètent mais aussi parce qu’en se formalisant sous forme de fiches produits et de guides pratiques de plus en plus accessibles sur Internet, le savoir médical n’est plus seulement l’apanage du clinicien. S’appuyant sur ces ressources en ligne, certains jeunes adultes, revendiquent le droit et la compétence de faire leurs propres choix en matière de consommation détournée des médicaments.
Comprendre comment les individus s’informent sur les médicaments consommés hors du cadre médical et font sens des informations recueillies sur Internet nécessite aussi de considérer les contextes macrosociaux dans lesquels s’inscrivent ces pratiques de consommation. En plus de l’information qui circule sur Internet, la grande disponibilité des médicaments détournés, largement prescrits ou accessibles en vente libre, contribue à leur familiarité et à la banalisation de leur utilisation même détournée. De plus, même si les individus sont ambivalents à l’égard de la « médicamentalisation » [23] de la société, le médicament reste globalement investi d’une image d’efficacité et de sécurité. Il est marqué par son parcours et par le dispositif d’encadrement de la production et de la mise en marché et ce, bien que plusieurs étapes de ce parcours (la consultation médicale et la distribution par le pharmacien) aient été éliminées dans le cas de l’utilisation détournée. Cela témoigne de la grande autonomie du médicament qui est porteur d’une technologie médicale certifiée (et même estampillée) qui facilite son utilisation hors du cadre médical [24].
[1] THOËR Christine, PIERRET Janine, LEVY Joseph- Josy, « Détournement, abus, dopage et automédication : quelques réflexions sur des pratiques d’utilisation du médicament hors avis médical », Drogues santé et société, vol. 7, n° 2008, p. 19- 56.
[2] COOPER R.J., « Over-the-counter medicine abuse – a review of the literature », Journal of Substance Use, vol. 18 n° 2, 2013, p. 82-107.
[3] BOGLE, K.E., SMITH B.H., « Illicit methylphenidate use : a review of prevalence, availability, pharmacology, and consequences », Current Drug Abuse Reviews, vol. 2, n° 2, 2009, p. 157-176 ; WILENS T.E., ADLER L.A., ADAMS J., SGAMBATI S., ROTROSEN J., SAWTELLE R., UTZINGER L., et al., « Misuse and diversion of stimulants prescribed for ADHD : a systematic review of the literature », Journal of the American Academy of Child and Adolescent Psychiatry, vol. 47, n° 1, 2008, p. 21-31.
[4] QUINTERO Gilbert, BUNDY Henry, « Most of the time you already know : pharmaceutical information assembly by young adults on the internet », Substance Use and Misuse, vol. 46, n° 7, 2011, p. 898-909 ; THOËR Christine, ROBITAILLE Michelle, « Utiliser des médicaments stimulants pour améliorer sa performance. Usages et discours de jeunes adultes québécois », Drogues santé et société, vol. 10, n° 2, 2011, p1-41 ; DeSANTIS A.D., WEBB E.M., NOAR S.M., « Illicit Use of Prescription ADHD Medications on a College Campus : A Multimethodological Approach », Journal of American College Health, vol. 57, n° 3, 2008, p. 315-323.
[5] ORANGE V., MILLERAND F., THOËR C., « Profils et modes de contribution dans un forum sur le détournement de médicaments : une analyse diachronique des interactions », Revue internationale de communication sociale et publique, n° 10, 2013, p. 87- 106 ; THOËR C., AUMOND S., « Construction des savoirs et du risque relatifs aux médicaments détournés », Anthropologie et Sociétés, 35, n° 1, 2011, p. 111-128 ; TACKETT-GIBSON M., « Voluntary use, risk, and online drug-use discourse », in MURGIUIA E., TACKETT-GIBSON M., LESSEM A. (dir.), Real Drugs in a Virtual World : Drugs Discourse and Community Online, Lanham, Lexington Books, 2007, p. 67-82 ; HANSON C.L., BURTON S.H., GIRAUDCARRIER C., WEST J.H., BARNES M.D., HANSEN B., « Tweaking and Tweeting : Exploring Twitter for Nonmedical Use of a Psychostimulant Drug (Adderall) Among College Students », Journal of Medical Internet Research, 2013, 15, n° 4, e62.
[6] QUINTERO Gilbert, BUNDY Henry, 2011, ibid.
[7] HANSON et al., 2013, ibid.
[8] JAURÉGUIBERRY F., PROULX S., Usages et enjeux des technologies de communication, Éd. Érès, Toulouse, 2011, 143 p.
[9] AKRICH M., « Le médicament comme objet technique », Revue internationale de psychopathologie, n° 21, 1996, p. 135-158.
[10] TRABAL P., « La perception du dopage : une approche pragmatique » Psychotropes, vol. 8, n° 3-4, 2002, p. 89-99.
[11] La collecte de donnée s’est produite en trois phases de 2009 à 2011. Les participants ont été recrutés par petites annonces sur différents médias en ligne et hors ligne et via la méthode dite de boule de neige. L’objectif était de diversifier les profils des personnes rencontrées.
[12] Plusieurs des étudiants étaient aussi sur le marché du travail, le nombre total d’heures travaillées variant de 10 à 25 heures par semaine.
[13] THOËR et ROBITAILLE, 2011, ibid.
[14] PAILLÉ P., « L’analyse par théorisation ancrée », Cahiers de recherche sociologique, nº 23, 1994, p. 147-181.
[15] Plus de la moitié de nos participants ont été initiés par leurs amis ou par des collègues d’études qui leur ont offert un ou plusieurs comprimés et leur ont fourni certaines informations sur son utilisation.
[16] Au Québec, les médicaments sont comptés et servis en pharmacie et seuls le nom commercial du produit, l’identité du bénéficiaire et quelques recommandations d’usage sont indiqués sur le flacon.
[17] THOËR Christine, « Expressing, Communicating and Discussing Suicide : Nature, Effects and Methods of Interacting Through Online Discussion Platforms », in MISHARA Brian, KERKHOF Ad (dir.), Suicide Prevention and New Technologies : Evidence based Pratice, Palgrave Macmillan, 2013, p. 24-38.
[18] QUINTERO Gilbert, BUNDY Henry, 2011, ibid.
[19] THOËR C., MILLERAND F., ORANGE V., MYLES D., « Se raconter et conseiller les autres sur les forums en ligne : la construction d’une identité d’expert en médicaments détournés », in PERRATON C., KANE O., DUMAIS F. (dir.), Mobilisation de l’objet technique dans la production de soi, Presses de l’Université du Québec, 2012, p. 99-120.
[20] BERCKER H.S., Outsiders. Études de sociologie de la déviance, Paris, Métailié, 1985.
[21] Il apparaît ainsi comme le souligne Giddens (1991) que la prise de distance vis à vis de la biomédecine n’est pas généralisée et qu’elle touche plus particulièrement, les cliniciens, points d’entrée vers les systèmes experts. GIDDENS A., Modernity and Self-Identity, Cambridge, Polity Press, 1991.
[22] POLS J., « Knowing Patients : Turning Patient Knowledge into Science », Science, Technology, & Human Values, vol. 39, n° 1, 2014, p. 73-97.
[23] DESCLAUX A., LEVY J.J., « Cultures et médicaments. Ancien objet ou nouveau courant en anthropologie médicale », Anthropologie et sociétés, vol. 27, nº 2, 2003, p. 5-21.
[24] VAN DER GEEST S., REYNOLDS WHYTE S., HARDON A., « The anthropology of pharmaceuticals. A biographical approach », Annual Review of Anthropology, vol. 25, nº 1, 1996, p. 155-178.