Atelier doctoral 2003
Claire Sécail : La chronique judiciaire à la télévision, de Frédéric Pottecher à Clément Weill-Raynal
La curiosité du public pour la justice et la complexité de l'appareil judiciaire font du journalisme sur la justice un domaine très spécifique. On peut de fait s'interroger sur les pratiques de ce journalisme spécialisé.
C'est en 1954 que la loi interdit les images judiciaires. Il s'agit alors de rétablir l'autorité judiciaire et de faire jouer un rôle à la presse dans un projet de moralisation. L'adoption de cette loi rencontre un large consensus. La chronique judiciaire devient dès lors un exercice encadré.
Le dispositif encore plus encadré de la chronique de télévision ne pose pas de problème à Frédéric Pottecher. Il a le goût de la théâtralité. Sa première expérience à la radio date de 1937. A la télévision, sa chronique devient une sorte de one-man-show. Il propose une nouvelle forme de dramatisation des compte-rendus. Au fur et à mesure de sa carrière, le chroniqueur est de mieux en mieux accueillis par les tribunaux. Il trouve aussi un style et un public pour ses chroniques. Ses interventions sont souvent très longues (de 5 à 10mn) : il prend le temps de décrire longuement les audiences. Pendant dix ans, il réalise en moyenne deux chroniques par mois.
Une nouvelle génération de chroniqueurs judiciaires émerge dans les années 1970 ; ils paraissent à la fois plus jeunes et plus dociles. Paul Lefèvre appartient à cette génération. Il a fait des études de droit, puis de journalisme, a participé à Paris-Normandie puis s'est tourné vers la radio, car il éprouvait une réelle méfiance vis-à -vis de l'image. Progressivement, le compte-rendu est abandonné, c'est l'éditorial qui le remplace. La subjectivité du propos est plus assumée par les journalistes.
Il faut encore une nouvelle génération pour que l'image soit utilisée dans la chronique judiciaire. Mais ces chroniques restent globalement pauvres en images. Clément Weill-Raynal pratique quant à lui une vraie rédaction avec les images. Les temps de plateau diminuent au profit des temps de reportages sur les affaires judiciaires.
L'encadrement juridique est très important dans ce secteur. Les chroniques sont globalement homogènes dans les différents médias. Ce tableau est à replacer dans une histoire plus générale du journalisme : la figure du chroniqueur persiste et la spectacularisation du journal télévisé lui donne même une nouvelle place.