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Exposition "ALGERIE 1830-1962, avec Jacques Ferrandez" jusqu’au 29 juillet 2012, Musée de l’Armée (Hôtel des Invalides, Paris).
En écho au 50e anniversaire des Accords d’Evian qui permirent à l’Algérie d’accéder à son indépendance, cette exposition revient sur plus de 130 ans de présence militaire française en Algérie, de la conquête à l’indépendance. La démarche du musée de l’Armée est clairement historique et son approche pédagogique. Il invite le grand public à mieux comprendre une histoire longue marquée par des relations complexes, dont il apparaît aujourd’hui nécessaire de saisir les différents facteurs et aspects, notamment en l’abordant dans sa totalité, sans réduire l’approche à la seule période de la guerre d’Algérie (de 1954 à 1962). L’exposition réunit pas moins de 270 Å“uvres et objets - uniformes, armes, peintures, documents (officiels et personnels), photos, films, coupures de presse... - provenant des collections du musée de l’Armée et prêtés par des institutions françaises (musées, bibliothèques, centres d’archives audiovisuelles...). A travers ces pièces, le parcours retrace la chronologie des événements, en présente les protagonistes, en explique les causes et les effets. Abordés sous l’angle militaire, ils sont systématiquement replacés dans leur contexte politique, économique, social, international. Cette exposition met par ailleurs en exergue les représentations qui ont été faites de ces événements, en s’appuyant sur de nombreux documents audiovisuels (films d’actualités, fictions, série TV ...) diffusés sur une quarantaine de moniteurs qui ponctuent le parcours. Ces documents sont essentiellement issus des Archives françaises du film du CNC, de l’ECPAD, de l’INA ; mais on y trouve également des films rares comme ceux tournés pour le FLN ou des films d’amateurs.
Les éditions Casterman s’associent à cette exposition, à travers l’œuvre de Jacques Ferrandez, auteur et dessinateur des Carnets d’Orient. Cette bande dessinée en 10 tomes retrace l’histoire d’une famille de Pieds-noirs en Algérie des années 1830 à la fin des années 1950. L’univers de cette fiction narrative sert alternativement de toile de fond scénographique et de contrepoint à la succession des événements historiques et aux objets présentés. Par le regard et l’œuvre du dessinateur, sont ainsi mis en évidence, d’une part l’actualité de l’histoire de la colonisation et de la décolonisation de l’Algérie, d’autre part le travail par lequel un auteur de fiction s’approprie les sources matérielles et documentaires, les sélectionne, les assimile et les interprète. Le visiteur se voit donc offrir l’exemple d’une lecture possible des événements, soigneusement présentée comme telle et confrontée aux objets, documents et représentations de ces derniers, ainsi qu’aux analyses des historiens. Car cet événement s’adresse au grand public. L’histoire de la présence de la France en Algérie est un épisode important de son histoire coloniale. Sa simple évocation génère souvent tensions, polémiques et passions chez les anciens acteurs des événements, comme chez ceux qui, aujourd’hui encore, se sentent proches d’eux. Le musée de l’Armée, conscient de la difficulté de ce projet, entend permettre à ses visiteurs, quels que soient leur âge, leur origine et leur sensibilité, d’appréhender la complexité de l’histoire coloniale de l’Algérie. Il se propose de leur fournir des éléments de compréhension et des repères : chronologies et cartes de la conquête, des affrontements et de la guerre de décolonisation ; évolutions du mode d’administration de l’Algérie et du rôle de l’Armée dans les dispositifs successifs ; cadres législatif, règlementaire et administratif dans lesquels s’inscrit son action...
Pour construire cet ambitieux projet, le musée s’est associé l’expertise d’historiens spécialistes des différentes périodes et aspects de cette histoire complexe. Ce travail collectif a permis l’élaboration d’une chronologie raisonnée ; la mise en évidence des éléments majeurs ; le choix d’objets, d’œuvres, de documents, notamment audiovisuels pour les dernières décennies. Autant d’éléments qui, sans imposer un regard univoque au visiteur, lui facilitent la compréhension de l’enchaînement des faits retracés. Ce souci de rigueur historique n’exclut pas une approche plus sensible des événements, qu’incarnent les dessins de Jacques Ferrandez. Par ailleurs, une place est faite, en fin de parcours, à la parole des témoins et à leurs mémoires, diverses, divergentes, voire opposées. Ainsi, après les analyses des historiens présentées dans des dispositifs audiovisuels au fil du parcours, le visiteur peut entendre, à la fin de sa visite, la voix, l’émotion et parfois la passion des anciens acteurs.
Commissariat :
Lieutenant-colonel Christophe Bertrand (Musée de l’Armée)
Emmanuel Ranvoisy (Musée de l’Armée)
Sébastien Denis (Université d’Aix-Marseille)
Pour plus d’informations, voir le mini-site dédié à l’exposition :